"La plume est la langue de la pensée"
Miguel de Cervantes Saavedra

06/01/2011

Réflexions autour de Wikileaks VII

Les vacances sont finies mais je tire encore un peu sur la corde de la facilité et vous propose pour clore ce tour de textes au sujet de Wikileaks deux articles. Le premier est à prendre pour ce qu'il est, une petite info rigolote, sans prétentions aucune, mais qui nous rappelle que l'art politique, si (peu) diplomatique soit-il n'est jamais vraiment éloigné de l'art poétique... Lisez donc l'article Des Haïkus cachés dans les mémos de Wikileaks sur le blog, hébergé par Le Monde, Big Browser.
Enfin je soumets à votre sagacité ce texte, lu en parcourant Le Monde, ainsi que ces liens tirés du site du même journal:




Haïkus tiré du site Haïkuleaks


WikiLeaks, au secret du commerce

par Jean Cattan, faculté de droit d'Aix-en-Provence, diplômé du Collège d'Europe



Les cables diplomatiques révélés par WikiLeaks ont emporté avec eux un morceau imposant de cette vaste barrière qui protégeait la terre du secret. Un morceau de plus tombé au son de la marche triomphante d'Internet. Un adultère, un mauvais mot, une conspiration ou un plagiat, Internet brasse tout. Comme dans Le Mot de Victor Hugo, chaque secret se voit pousser des ailes pour se répandre à la vitesse de la lumière. Jamais il n'a été aussi vrai que "Tout peut sortir d'un mot qu'en passant vous perdîtes ; Tout, la haine et le deuil !"


Nos vies privées, nos vies publiques, nos vies partagées et nos vies cachées ; toutes sont concernées et ne font désormais plus qu'une : la vie d'un village. Un village avec ses cafés, plus ou moins fermés. Aujourd'hui, nous nous émouvons face à ce constat simple, brutal et finalement bien triste : le café de la diplomatie ne vaut guère plus que celui du commerce. Le café de la diplomatie, comptoir des rêves et de notre imaginaire. Tout au plus vaut-il le comptoir d'un bar-tabac. Changeons de maison, allons pour un autre café ? Que pensez-vous de celui du Goncourt ? Détrompez-vous, il se dit qu'il ne vaudrait pas mieux qu'une cafétéria étudiante. D'ailleurs, un autre Wiki y aurait aussi fait sa petite révolution. N'ayons pas là le moindre regret. Les cloisons tombent à la vitesse des mythes et c'en est pour le mieux.


Que l'on pense à ces diplomates que l'on aime pour leur élégance, leur savoir, leur jardin privé ou encore leur inaccessibilité. Derrière leur masque, ils sont l'incarnation d'une verticalité indue qui n'est décidément plus de mise. Le piètre écrivain s'excuse dans les remerciements de La carte et le territoire de ne pas pouvoir, faute de moyens, faire de recherches aussi importantes que celles d'un écrivain américain. Soit. Qu'il rende son prix et que l'on n'en parle plus.

TRANSPARENCE
Mais le diplomate, lui, a des privilèges : une valise diplomatique, un passeport, une fiscalité généreuse, des salaires au-dessus de tout et des administrations aux petits soins. Pourquoi ? Pour des banalités et une absence de discernement totale quant à la nécessité de veiller à ses conversations. La diplomatie mondiale est décidément surcotée. Le changement qu'elle va subir sera colossal. Il sera aussi douloureux si elle ne le prend pas elle-même en main. L'homme des révélations pourra être condamné, ses agissements conspués par les législateurs du monde entier, l'accès aux informations toujours plus sécurisé… Magie du numérique, tout cela sera vain. Le changement n'en sera alors que plus douloureux si on lui résiste.


Pour autant, le changement ne doit pas nécessairement aller vers la transparence absolue. La transparence entraîne inévitablement la constitution de nouvelles parcelles de secrets. Le secret est en nous. Nous le cultivons et le chérissons parce que nous en avons besoin.
On se souviendra de cette photographie des grands chefs d'Etats réunis autour d'une table microscopique lors du sommet de Copenhague. L'exposition toujours plus pressante au public pousse les tenants de la verticalité à se retrouver en marge de la foule là où la foule était à la marge. Et ce, au prix d'une inefficacité certaine.

Si le secret doit être gardé, lui ne pourra plus garder nos hontes, nos archaïsmes et nos hiérarchies absurdes. Le respect du secret s'imposera là où le secret garde ce qui doit être respecté. Jusqu'à présent, le seul secret qui soit tombé est celui de cette identité entre les craintes et le savoir de tous et la prétendue expertise de quelques-uns. Plus jamais le secret ne pourra déguiser ces inégalités et incivilités ignorantes de notre démocratie.

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