En dépoussiérant de vieux dossiers sur mon ordi, je suis tombé sur cette nouvelle, écrite il y a quelques années et que je n'avais jamais rendu publique. Je la partage donc avec vous, très légèrement remise au goût du jour (un peu d'écriture inclusive ne fait pas de mâle dans ce genre de cas ;) ) mais en gardant la trame maladroite et les accents d'un cyberpunk un peu vieilli.
Et d'ici quelques jours je mettrai ici un autre texte, plus récent... à suivre.
Maudits hackers
Depuis le dernier étage de l’arcologie Est de Paris, Shelley embrassait toute la ville de son regard gris carnassier. D’un claquement de doigts elle éteignit la baie-vitrée sur laquelle apparurent un à un les motifs néo-rétro de son artiste d’avant-garde préféré et préprogrammé. Le psychédélisme électro-vintage s’étalait, irisait en ombelles sur les vastes panneaux qui, il y a un instant encore, lui donnaient à voir l’étendue de son pouvoir. Elle détestait voir le jour poindre. Shelley de BioNike alla s’asseoir derrière son vaste bureau. Le fauteuil en sky s’ajusta automatiquement aux courbes encore gracieuse de la sexagénaire. Elle leva le petit doigt et un écran virtuel apparut, comme éclot du marbre de son pupitre. Elle l’étira afin de lui donner une taille convenable pour ses yeux fatigués. D’un mouvement de pensée elle se rendit sur son site personnel. La voix de PIA, son IA personnelle, l’accueillit. D’une nouvelle connexion neuronale Shelley ouvrit sa boîte de conversation. Mais le message qu’elle attendait n’était pas arrivé. Elle referma violemment l’écrin de ses missives privées et d’un ordre mental congédia sa servante électronique, tout en lui demandant de la prévenir immédiatement si un nouvel appel entrait. Elle se plongea dans l’un des dossiers qui encombrait l’espace virtuel de son bureau. L’une des petites entreprises qui composaient le consortium qu’elle dirigeait faisait l’objet d’une OPA hostile de la part de la firme qui gérait la cité moscovite. Elle lisait et relisait sans parvenir à se concentrer, revenant sans cesses sur les mêmes lignes, butant sur les mêmes mots. Elle referma le dossier et d’un geste souple du poignet fit s’évaporer la fenêtre ouverte sur le monde virtuel. Shelley appuya sur un bouton du siège et son train de roulage s’escamota. Sa chaire perdit un peu de hauteur dans un chuintement pneumatique avant de se stabiliser. La PDG de Paris imprima sur la carte du fauteuil en sustentation le chemin de son laboratoire et celui-ci l’y mena dans un soupir dénué de tout romantisme.
Shelley regardait la poupée inanimée, étendue sur la table d’opération. Une petite fille d’une dizaine d’année, crâne rasé, visage lisse, yeux clos par la fatigue d’une vie suspendue aux lèvres cousues par la maladie, des tubes qui alimentent, remplacent les fonctions vitales vidées de leurs substances. Et les « bip ! bip ! » des machines qui respirent. Les aspirations d’un être qui ne demande qu’à expirer. Des courbes qui dessinent les montagnes russes que la mère parcourait des yeux. Quelques larmes glissaient sur les joues liftées de Shelley. « Ne t’inquiètes pas ma chérie... Dans quelques jours, ta maman te redonnera la vie. »
« Shelley... Une vidéo-com sur votre première ligne. » Un « qui » lui traversa l’esprit et Pia incrusta sur sa lentille baignée de larmes les traits secs du médecin-chef de la section expérimentale de la clinique BioNike. Shelley essuya sa peine d’un revers de manche, sortit du labo et prit l’appel.
« C’est maintenant que vous appelez ? Ça fait des heures que j’attends ! J’espère au moins que vous avez de bonnes nouvelles pour moi, parce que sinon... »
« On a réussi ! »
« Comment ? »
« On a réussi ! On a téléchargé de manière satisfaisante l’esprit d’un être humain ! »
« Vous... Vous êtes sûr ? »
« Oui Madame. Bien entendu, nous devons encore effectuer des tests. Nous devons analyser l’évolution sur le long terme... Mais on a une version stable de la personnalité ! Un transfert réussi du monde biologique à l’e-World. Je... »
« Merci Victor. Je vous rappelle plus tard. Pour l’instant ne divulguez l’information à personne. Je me charge d’informer le monde de notre grande réussite. »
La PDG de Paris-Cité-Bulle n’était plus que Shelley, la mère de sa petite Marie. Sa petite sauterelle. Son ange blond plongée dans un coma artificiel depuis presque cinq ans. La femme perdit la dignité de sa fonction, fondit en larmes, des larmes de joie cette fois et couru jusqu’au Labo. La porte s’ouvrit en identifiant sa pupille trempée. Shelley s’effondra sur le corps immobile de Marie. Elle pleurait et ses larmes imprégnaient le pyjama immaculé de sa chère fille. Elle se releva et prit le visage de Marie entre ses mains. Les larmes s’estompèrent et le temps d’un sourire une éclaircie inonda la pièce de sa douce chaleur. La peau de Marie se colora d’un joli ton ocre.
« Ça y est mon ange... Maman a réussi. Je vais bientôt pouvoir te serrer dans mes bras... On va se retrouver mon cœur. » Les larmes la submergèrent à nouveau. Elle était prise de hoquet, les mots ne pouvaient plus sortir, mais un bonheur qu’elle n’avait plus connu depuis des années irradiait de tout son être.
*
Le soleil était sur le point de se lever... c’est en tous cas ce que distillait la radio d’info continue dans la petite pièce qui servait de chambre-cuisine-salle à manger à la famille. Le père n’était déjà plus là, parti comme chaque jour hanter les chantiers du Paris de ce milieu du XXIe siècle... Paris que le consortium propriétaire mettait sous cloche. Paris-Cité-Bulle. Une protection contre la pollution de l'atmosphère. La nouvelle cage invisible de l'humanité. La mère goûtait à ces quelques instants de délices pendant lesquels elle n’avait plus de mari et pas encore d’enfants. L’aspirateur à la main, elle se regarda dans le reflet du miroir et ne vit pas ses yeux tristes pendre lamentablement sur ses joues creusées. Elle se voyait sans âge, l’iris ouverte sur les beautés de l’avenir et la peau fraîche des matins enfantins.
Son fils avait allumé sa console et commencerait d’ici un petit quart d’heure ses cours de schizophrénie appliquée aux mondes virtuels. Il terminait en toute hâte sa ration alimentaire matinale et les exercices pratiques sur lesquels il s’était endormi la veille au soir. Sa mère l'entendait psalmodier en boucle les slogans de son PsycoCoach « Je ne suis pas mon avatar », « Mon corps n’est pas un corps de données... Mon corps n’est qu’un prêt. » Il s’était enfermé à double tour, clef codée en hélice enroulée sur elle-même, dans sa chambre. Mais quelques minutes plus tard, il décodait sa porte et criait : « Maman ! Y’a plus d’flux ! » La mère sursauta. L’image du temps révolu se brisa sur son reflet et lui apparurent toutes les cruautés du temps présent. Ses yeux étaient lavés de toute passion par une vie déjà trop longue de 40 ans. Les marques bleues-mauves des coups de foudre de son mari violaient la pâleur cendrée de son visage islandais. « Mmmmmh... Je mets la pompe en route. Bouge pas, mon grand. » Elle dirigea ses pas lents vers la porte d’entrée, ouvrit le petit boîtier situé à gauche, repositionna l’interrupteur sur « ON » après avoir glissé sa carte de paiement et l’empreinte de sa main droite pour redonner du crédit à la famille. Le ronronnement de la pompe à fric se fit entendre. Quelques secondes et monta du filtre de la porte de son fils un « merci » emprunt d’une reconnaissance vocale dans laquelle la mère ne le reconnaissait plus. Elle songea à sa fille qui, elle, pouvait réussir. Sortir de la routine et prendre l’itinéraire des hautes sphères. Elle s’apprêtait à participer à la toute première édition de la PT Academy. Sa fille, ce bout de chaire qu’elle avait porté 9 mois avait été sélectionnée et serait, peut-être, la première Prêtresse Technologique associée à BHL, l’intelligence artificielle parisienne. Selon les prévisions des spécialistes dans quelques jours, quelques semaines tout au plus, la Singularité Technologique devrait se manifester et donner à BHL le surplus d'âme qui lui manquait encore. Tous les citoyens attendaient cet évènement avec une impatience croissante. La Singularité serait le début d’une nouvelle révolution... de la prochaine évolution.
*
Dans l’espace sans temps de l’e-World des millions, des milliards d’avatars rejouaient à chaque minute le grand acte de la vie réelle. Dans cette modélisation du monde tout n’était que caricature… les détails se payaient chers et l’inutile n’avait pas sa place.
Iels étaient là tous les cinq quand Arthur se matérialisa dans leur repère, sorte de salon privé installé dans les recoins oubliés de quelques jeux en lignes. Ça ressemblait à un squat, une fabrique désaffectée... L’usine à rêve de leur réalité virtuelle où ils promenaient leurs avatars nonchalants. Arthur, Charles, Isidore, Antonin, Edgar et Paul... Derrières ses prénoms se cachaient les membres des hackers maudits, un groupe de pirates qui depuis de longs mois s’attelaient à démonter le mythe à naître de la Singularité technologique. Iels ne croyaient pas et ne voyaient dans cet espoir qui tenait le peuple qu’un nouvel opium. Chacun des six noms avait pris pour cible l’un des six nouveaux empires de l’ère virtuelle... Paris, Moscou, Berlin, New-York, Pékin et Mexico. Les six premières cités-bulles, celles qui avaient contrôlé la réaction en chaîne et avait mis sous la cloche de la privatisation les grandes villes de la planète.
Les six geeks ne s’étaient jamais vu... mais iels se connaissaient pourtant tel des adelphes, se côtoyant quotidiennement à travers le miroir virtuel aux alouettes. Iels auraient pu dire ce que chacun.e aimait mieux que leurs propres parents ; énumérer les aspirations des autres ; découvrir chacune de leurs pensées les plus intimes ; commander pour l’autre la pizza garnie de ses ingrédients préférés... mais iels auraient tout aussi bien pu se croiser dans la rue sans se reconnaître. Ensemble iels avaient sillonné le monde entier sans bouger leurs fesses de leurs écrans. Iels s’étaient même serrés dans leurs bras haptiques, avaient échangé des milliers de fichiers visuels, sonores... avaient goûté ensemble aux saveurs des cinq continents grâce aux imprimantes sensitives. Certains, certaines, iels n’avaient sur ce point aucune certitude, avaient expérimenté en duo, trio et même en groupe le sexe virtuel. Iels se connaissaient très bien au fond, mais n’avaient aucune idée des formes des autres.
Soudain Edgar fit apparaître, en quelques lignes de codes, un gros chat noir qui vint frôler chacun des cinq hackers en même temps. « Je crois que j’ai pécho kekchose ! V'nez voir ça... » Le chat disparut dans un ronronnement binaire et les cinq avatars, sortes de poulpes multiformes, se redressèrent, leurs couleurs passèrent du bleu-ennui au mauve-curiosité. Iels nagèrent dans l’espace virtuel qui les séparait. L’agitation qui secouait les couleurs et les formes de leurs avatars en disait plus long que tous les mots de toutes les langues de la Terre. Edgar avait déniché une faille de sécurité et pour Arthur s’ouvrait une fenêtre donnant sur son pire cauchemar.
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Shelley de BioNike avait convoqué le conseil d'administration de Paris dans l’après-midi. Actionnaire majoritaire de l'entreprise héritée de son père, BioNike spécialisée en Intelligence Artificielle, Shelley appuyait son pouvoir sur la domination qu'exerçait son entreprise sur ses partenaires au sein du Consortium Paris-Cité-Bulle et sur le réseau de filiales qu'elle entretenait dans les principales cités-bulles du monde citoyen.
La puissante PDG parisienne avait fait apparaître l'avatar de Pia dans sa réalité augmentée. Elle la regardait en pensant qu'elle touchait au but. Elle songeait à quelle point cet être artificiel, malgré toutes les prouesses technologiques dont ses équipes et elle-même étaient capables, ne représentait que le premier maillon de l'évolution d'une nouvelle espèce. Elle savait depuis longtemps, depuis toute petite même... quand son père lui livrait ses pensée sur l'évolution de l'humanité, que la Singularité dépendait grandement de l'interaction entre la mise au point d'une intelligence artificielle et le téléchargement de l'esprit humain. Mais comme pour la question de la poule et de l'œuf, Shelley s'était toujours demandé ce qui viendrait en premier. Aujourd'hui elle semblait enfin sur le point de résoudre cette énigme. La numérisation de l'intelligence humaine servirait de base au développement de la super intelligence artificielle... et cette fusion permettrait l'accélération nécessaire à l'avènement de la Singularité qui elle-même donnerait une existence réelle au nouveau Dieu virtuel. Cet avatar divin serait le guide des premiers pas d'une humanité colonisant le continent virtuel. Pas un cycle, mais un voix tracée vers le futur.
Shelley sortit de sa torpeur et commanda à Pia de programmer en urgence une entrevue avec BHL. La sexagénaire connaissait bien les limites de ce logiciel sophistiqué d'aide à la décision... mais elle savait aussi que l'approche de la Singularité pourrait très bien provoquer ses premiers symptômes avant même son éclosion. Et, comme les simples citoyens, elle était dépendante aux conseils avisés des machines... mais elle avait l'avantage de bénéficier de ceux de l'artifice d'intelligence le plus évolué de son époque.
Un quart d'heure plus tard, à 12h30, la Présidente, Directrice et Général de la bulle parisienne se présentait aux portes du sas d'accès ultra-sécurisé de l'écrin où somnolait certainement BHL, dans le ronron de la routine des tâches automatiques du cerveau synthétique de la cité. Son iris, ses empreintes digitales, ainsi qu'un échantillon de son ADN... mais aussi un scan de ses fonctions vitales permirent à la matrice de sécurité de s'assurer qu'il s'agissait bien de la PDG et qu'elle était bien seul. Shelley tapota enfin son code secret et la porte s'ouvrit.
Elle se dirigea vers un casier d'où elle sortit sa combinaison d'immersion en milieu virtuel. Elle se déshabilla. Les formes que dessinait son uniforme de femme-maîtresse s’effacèrent, s’affaissèrent, découvrant cette chair ridée, ce corps vieilli qu’elle ne supportait plus. Elle lava cette carcasse honnie, purifia cette enveloppe charnelle qui lui pesait tant. Elle enfila la combinaison et passa sous une nouvelle douche qui termina d'aseptiser cette seconde peau. Elle tendit sa rétine à la caméra de garde devant la porte d'entrée de la chambre de BHL qui se saisit de sa tétine, la suça jusqu’au nerf optique pour l'ultime identification. La porte s'ouvrit enfin.
BHL n’était rien d’autre qu’un montage, un assemblage grotesque de consoles, de PC, d’écrans. L’histoire de l’informatique s’y dévoilait en strates. Des câbles reliaient les uns aux autres ces éléments disparates, plongeaient dans les murs, illuminant les écrans qui les tapissaient. La chambre était noire et traversée de quelques éclairs aux couleurs du génie endormi. Shelley s’approcha. Elle saisit le siège qui semblait l’attendre. Elle était la seule à pouvoir ainsi consulter BHL en toute intimité. Elle savait qu’elle allait bientôt perdre ce privilège… D’ici quelques semaines une PT serait élue par les téléspectateurs. Elle deviendrait alors celle par qui le peuple interrogerait BHL lorsque celui-ci serait devenu l’une des manifestations de l’IAM, l’Intelligence Artificielle Mondiale… le prochain Dieu créé par l’humanité.
Shelley déposa son offrande, une console dernier cri à la surface du cerveau artificiel. Elle s’assit, posa sur sa tête la couronne d’électrodes, connecta les tentacules de BHL aux stigmates de sa combinaisons. Une série de programme pénétra les défenses immunitaires de l’implant de Shelley qui lança une série d’ordre au pharmacopatch, libérant petit à petit une dose opiacée suffisante pour mener la PDG sur les traces du dragon. Elle posa sa question avant de sombrer dans la transe durant laquelle elle verrait sa réponse : « BHL, toi dont la sagesse est pure, lavée de toute passion, consens à m’éclairer de ta lumière. Puis-je enfin initier le grand projet, la numérisation de l’humanité ? »
*
Il était déjà presque midi et la mère commençait à peine à cuisiner. Le canal des émissions de jeux avait envahi le séjour. La mère aimait suivre la roue de la fortune, deviner le juste prix et aurait aimé gagner les millions mis en jeux chaque jour en fin de matinée. Le père n’allait pas tarder. Il n’aurait, comme chaque jour qu’une petite demi-heure avant de repartir sur les chantiers. Le vieux robot de nettoyage, incapable de distinguer un motif d’une salissure, s’escrimait comme à chaque fois que la mère s’en servait à frotter les marbrures du carrelage. Elle lui décocha un coup du tranchant de la main à l’arrière de sa tête de boîte de conserve et l’envoya étendre le linge… tâche dont il s’acquittait avec plus de facilité.
Elle attendait avec une exaspération croissante que l’androïde, d’occas’, que son mari lui avait offert avec sa première paie du chantier de la bulle, revienne du marché. On était jeudi et aux portes de la cité les terriens, ceux qui vivaient en-dehors des bulles citoyennes, venaient vendre les produits de la terre… Produits dont le consortium disait qu’ils étaient impropre à la consommation, mais dont les prix imbattables faisaient oublier toute mise en garde. La rumeur prétendait que le consortium agissait de la sorte par pur intérêt… Après tout les légumes et autres fruits des Terres émergées étaient les seuls produits non brevetés par l’OMC, l’Organisation Mondiale Citoyenne, que consommaient les pauvres. La mère éprouvait chaque jeudi une grande fierté à envoyer son « andro » faire les courses… Elle était l’une des seules du quartier à en posséder un. Son mari était contremaître et son accession au chantier de la bulle de la cité était une promotion importante. Pas de quoi changer de niveau de vie, mais suffisant pour se payer ce petit luxe d’épater la galerie de mégères qu’elle côtoyait du temps où elle allait elle-même faire ses achats au marché noir.
Enfin l’androïde arriva de sa démarche mal assurée. Sa voix enrayée pria la mère de l’excuser du retard, mais le tramway avait subi une avarie et ce n’était que dix minutes plus tard que le robot avait pris l’initiative de rejoindre le domicile en empruntant l’un de ces bus qui ont tant de mal à se faire leur place dans le flot de circulation automobile. Le langage châtié du robot faisait toujours rire la mère. Elle mit les quelques patates et les carottes terriennes dans le bouillon de nutriments du PAIN quotidien vendu par le consortium…la Portion Alimentaire d’un Individu Normal. Le petit androïde doré s’assit en attendant que sa maîtresse lui donne de nouveaux ordres. La mère le fixa du coin de l’œil poser maladroitement son séant métallique sur la chaise en plastique moulé. Elle songea à sa fille qui voyait dans l’androïde à la prose soutenue l’incarnation de C3PO, le diplorobot de la Guerre des Étoiles. Ça faisait des semaines qu’elle n’avait pas eu de nouvelles de sa fille. Elle savait bien que la préparation à la PT Academy était stricte et qu’aucune communication avec le monde extérieur n’était autorisée. Elle avait hâte que l’émission commence. Elle avait hâte de voir sa petite, sa beauté de 16 ans, passer les étapes et les votes des spectateurs jusqu’à la victoire finale… jusqu’à ce qu’elle devienne la première PT de l’histoire de Paris. Lundi, se dit-elle… Lundi je vais la voir. Est-ce qu’elle aura changé ? Est-ce qu’elle sera prête ? Soudain le train-train des jeux quotidien dérailla sur la voix des infos… Le présentateur, sans donner plus de détails, annonça que la PDG de la cité donnerait une conférence de presse le soir même à 20h avant de rendre l’antenne aux amuseurs des ménagères de moins de 50 ans.
Le fils était toujours enfermé dans sa chambre. Sa voix parvenait encore à sa mère, atténuée par le filtre d’intimité que le fiston avait installé dans sa chambre. Il suivait maintenant son cours de maths. La mère en était certaine car elle entendait les borborygmes caractéristiques que laissait échapper son fils lorsqu’il ne digérait pas les problèmes d’arithmétiques posés par son prof virtuel. Mais, tout d’un coup la porte de la chambre s’ouvrit et, tel un démon, son fils sorti de sa chambre en coup de vent alors que la porte laissait encore s’échapper quelques bruits intestinaux. « Je sors avec des copains. Je rentre pas tout de suite. On se verra à la conf’ de presse. » Et il fit claquer la porte de l’appart' et un baiser pour sa mère.
*
De la faille ouverte sur le réseau sécurisé citoyen, les hackers virent sortir des doigts, deux mains qui s’agrippèrent aux bordes de la fenêtre qui s’agrandissait toujours plus. Chacun des geek fut renvoyé aussitôt à l’espace clos de sa réalité. Déconnexion. Arthur dans sa chambre d’étudiant parisien. Edgar dans le cybercafé d’un vieux quartier bostonien. Isidore sous sa tente plantée dans le désert uruguayen. Un vieux wagon bringuebalant qui traverse le cañon du cuivre pour Antonin. Charles regagna la cabine étroite du bateau le menant à La Réunion. Et Paul dans sa chambre bruxelloise de modeste prof de poésie se retrouva comme un con.
Une tête apparut dans la fenêtre ouverte de leurs écrans, le regard penchée vers le sol. Muetdhiver. Le visage encadré d’une abondante chevelure dont la pixellisation s’estompait peu à peu se releva, découvrant des traits de toute beauté. Marie Zorn. Un visage doux qui irradiait la sérénité… et qui portant semblait se transformer à chaque instant. Le visage souriait. Néo. L’être doré passa les épaules hors de chaque écran, puis le buste, la taille, les jambes. Il s’assit sur le rebord de l’écran, comme en équilibre entre les mondes. Paul Durham. Une voix au timbre harmonieux s’empara des six hackers et leur susurra à la conscience : « Je suis le premier humain numérisé… Je suis le premier colon du continent virtuel. Je suis l’annonce de la mort de l’humanité. Je suis la post-humanité éternelle. Vous n’êtes déjà plus en vie. Je suis le dernier humain. Mourrez ! Ne craignez rien. Craignez-moi, oh oui ! » Motoko Kusanagi. L’image fantomatique tomba en arrière et disparu dans le fin fond du vide numérique... Le visage sans âge de C.D. Simack en persistance rétinienne.
Les écrans représentaient à nouveau la fabrique des rêves des pirates et chacun d’eux replongea avec délices dans les sensations digitales. Arthur grésillait. L’avatar semblait se disloquer, se recomposer, était parcouru, des tentacules à la tête, par des bandes comme sorties d’un antique téléviseur à tube cathodique. Puis l’image neigeuse se stabilisa à nouveau. Les autres se regardaient de leurs yeux multiples et globuleux. « Qu’est-ce que c’était qu’ça ? » Les couleurs qui explosaient indiquaient que la tempête ne s’était toujours pas calmée sous les crânes transparents et volumineux des céphalopodes. Puis d’un ton calme Arthur déclara : « Les gars, je crois qu’on vient de trouver ce qu’on cherchait. » Son avatar prit une forme plus humaine jusqu’à ressembler trait pour trait à celui qu’il était dans la réalité. « Je crois qu’il est temps qu’on se rencontre vraiment. » Arthur s’assit dans un fauteuil que ses formes dessinaient au fur et à mesure qu’elles s’y enfonçaient. Il monta le volume d’une radio d’info et toustes entendirent parler de l’annonce que ferait d’ici peu Shelley de BioNike.
Comme si la même idée traversait leurs esprits, après que la même expérience se soit jouée de leurs corps, chacun.e dans son coin se mit au travail. Iels n’avaient plus besoin de communiquer pour se comprendre. Edgar analysait les formes différentes qu’avait empruntées à la littérature l’étrange créature. Isidore tentait de déchiffrer les codes cachés, s’il y en avait, dans les paroles prononcées. Charles reliait la fenêtre qu’ils avaient tous vu s’ouvrir aux sensations qui avaient étreint leurs corps. Antonin cherchait le langage caché dans la mise en scène de l’apparition. Paul parcourait les mondes virtuels afin de découvrir si d’autres cybernautes avaient été victime de ce piratage hors norme. Arthur se projetait lui dans les visions que la voix avait provoquées. Il connaissait cette voix. Il lui avait fallu quelques secondes après le silence pour la reconnaître. Il savait qu’elle était la clef de la porte de sortie. Il lança aux autres : « Vous me suivez ? »
*
Avec l’accord sans réserve du CA de Paris-Cité-Bulle, Shelley de BioNike avait invité les médias du monde entier à sa conférence de presse et tous se pressaient maintenant devant de la table derrière laquelle se tenait la PDG de Paris-Cité-Bulle. Elle présenterait cette première numérisation d'une intelligence humaine comme le signe annonciateur de la Singularité... Cette réussite n'était qu'une première étape. Dans les mois à venir l'OMC devrait gérer les demandes de téléchargement. Et selon le plan prévu, on offrirait en premier lieu ces numérisations à des cobayes volontaires, choisis parmi les populations démunies. On leur avait promis le paradis virtuel... ils en seraient les pionniers.
Au pied de l’arcologie la foule se massait, bruissait des rumeurs les plus folles. Beaucoup s’étaient laissé dire que les premiers signes annonciateurs de la Singularité s’étaient manifestés et que la PDG elle-même n’était déjà plus humaine. Certains pensaient que la femme la plus puissante de Paris leur signifierait le début de la numérisation de l’humanité. Des prédicateurs prédisaient à qui voulaient bien les écouter, ceux qui élargissaient assez les mailles du filtre auditif, l’avènement du nouveau Dieu. « Car en vérité je vous le dit... ce soir c’est Dieu que nous fêtons. Ce soir Il descend sur terre et nous guidera vers le paradis virtuel. » Pour beaucoup de citoyens, la Singularité technologique se résumait à l’émergence d’une intelligence artificielle infinie, nouvel avatar des croyances divines, dont les futures PT seraient les interprètes. Toutes les enceintes de la ville, les baies-vitrées des arcologies, crachaient leurs écrans publicitaires à la face des citoyens. Les plus riches profitaient déjà du spectacle en immersion totale dans l’e-World.
Debout dans la rigidité de sa fonction, Shelley attendait le signal du canal officiel pour commencer son allocution. Elle prit une gorgée d’eau. Une eau cristalline qui aurait fait baver plus d’un concitoyen, trop habitués aux eaux troubles de leurs conditions économiques. Enfin la petite lumière rouge s’alluma sur la caméra fixe en face d’elle. Un technicien lui afficha sa main, doigts écartés. Sa voix retentit. 5… 4… 3… Seuls ses doigts continuèrent le décompte… 2… 1…
« Chers citoyens, chers concitoyens,
J’ai ce soir l’immense privilège, le bonheur même, d’être la voix qui annonce à l’humanité que le compte à rebours vers son propre dépassement est lancé. Demain, dans quelques jours, commencera la plus grande œuvre que l’humanité se soit jamais confier : auto-réalisé son évolution. Dans quelques semaines tout au plus, nous lancerons ici à Paris, mais très vite dans toute les Cités-Bulles, la numérisation de l’essence de l’humanité, de son esprit… de nos esprits. N’ayez pas peur! Nous allons enfin abandonner nos corps, cette vieille enveloppe qui ne sera bientôt plus qu’une relique… Vous ne devrez pas traîner le souvenir de l’homme comme un boulet. L’ère de l’humain de chair et d’os est révolu… voici venu le temps de l’humanité 2.0. »
Au pied de l’arcologie, la mère et le père scrutaient la multitude, tentaient d’apercevoir leur fils. Il leur avait envoyé un message pour leur dire qu’il arrivait. Le père et la mère se tenait par la main, perdu dans cette foule immense. La mère aurait aimé que son fils et sa fille soient avec eux. Le père malgré la fatigue d’une journée de travail avait le visage radieux d’une soirée de picole… Pourtant il n’avait rien bu. Le car de la compagnie de BTP l’avait déposé lui et son équipe directement ici. Exceptionnellement ils avaient pu terminer plus tôt afin de pouvoir assister en directe à l’évènement. La mère avait mis sa plus belle robe… pourtant trop vieille pour faire de l’effet, même à son mari. Lui portait son bleu de travail, noirci par la poussière du chantier. Il portait dans sa main laissée libre son casque et ses lunettes de protection. Des vendeurs ambulants proposaient des lunettes de plongées en milieu virtuel afin de vivre l’avènement en 3D. La mère supplia du regard son époux qui d’un signe de sa grosse main commanda 2 paires de lunettes. Le salaire d’une semaine de travail venait de disparaître… mais après tout ce n’était pas tous les jours qu’on fêtait l’arrivée de la Singularité. Ils levèrent les yeux au ciel et, sortant de la façade de l’arcologie, mesurant 20m, Shelley de BioNike s’adressa à eux… Ils en restèrent bouche-baie vitrée quand ils l’entendirent confirmer l’arrivée de la post-humanité.
Arthur reconnu sans mal Paul... Zorra de son vrai nom. Ils se retrouvèrent aux abords de la place qui s’étalait au pied de l’arcologie. Leurs quatre camarades ne seraient pas physiquement là... mais ils veilleraient sur eux depuis le cyberespace. Ils s’enfoncèrent tous les deux dans la foule qui grossissait toujours plus. On aurait dit que le monde entier s’était donné rendez-vous à Paris. Et c’était un peu le cas. Entre les personnes physiques, les avatars virtuels, les robots manœuvrés à distances… c’était bien toute la citoyenneté qui piétiner d’impatience face à Shelley.
Les deux hackers activèrent leurs appli anti-pub, poussèrent leurs filtres auditifs au maximum et rayèrent de leurs vue les avatars et autres robots virtuels venus rendre compte de l’ambiance pour quelques riches citoyens d’autres cités. Ils se frayaient un chemin avec difficulté mais approchaient de la porte de l’arcologie Est. A dix mètres, la milice citoyenne avait dressait un barrage. Derrières, quelques petits blindés pointaient leurs canons à eaux, à ondes et à feu sur la foule.
Le père et la mère reconnurent leur fils. « Et mon grand! » gueula le père de sa voix forte. Arthur se retourna et leur fit signe. Ils leur présenta en vitesse Zorra et leur tendit deux petites pilules. « Prenez ça! » lâcha-t-il. « C'est quoi? » grogna le père. « Ça les empêchera de prendre le contrôle de vos implants quand nous serons à l'intérieur. ». « Quoi? A l'intérieur de quoi? » « Écoute papa, on a pas le temps. » Arthur se tourna vers sa mère: « Maman, c'est peut-être notre dernière chance de revoir ma sœur. » Elle vit pour la première fois dans les yeux de son geek de fils, une intensité dont elle ne l’avait jamais cru capable, elle se tourna vers son mari: « Fais confiance à ton fils... avale! » Et, comme pour lui montrer l'exemple, elle jeta dans sa gorge la gélule. Les deux hackers et les parents enfilèrent ensuite quelques tenus virtuelles qui leurs ouvrirent une brèche dans le pare-feu réel. Un officier les salua même. Ils entendirent alors les mots de la Présidente Directrice Générale résonner dans le hall d’accueil.
Shelley de BioNike continuait à balancer son discours stéréotypé, écrit par son chargé de com’ en quelques heures… mais elle ne cessait de pensé en son fort intérieur à sa fille. Toutes les recherches qu’elle avait menées depuis des dizaines d’années et qui trouvaient aujourd’hui leur aboutissement, elle les mettrait en premier lieu au service de son ange, de sa tendre petite crevette. Le retour image lui laissait deviner l’ampleur de ce qu’elle vivait… l’incroyable audience cumulée qui la suivait : les citoyens des arcologies branchées sur les canaux de l’e-World, les concitoyens parisiens massés au pied de sa tour, les citoyens des autres bulles qui pilotaient sur la place parisienne leurs avatars… Tout ce que la planète comptait de citoyens, ou presque, assistait à son discours. Et elle n’arrivait qu’avec peine à lire ce que son prompteur virtuel déroulait devant elle. Elle repensait à la visite qu’elle avait effectué dans l’après-midi auprès de la fille que l’équipe du docteur Victor était parvenu à télécharger. Elle avait vu ces traits si épais, ces cheveux gras de citoyenne de la ville basse. Elle avait parcouru en toute hâte le résumé que lui avait préparé le docteur. La fille avait été conçue sans l’assistance de la génétique et était née par césarienne. Elle avait un frère qui était lui aussi né, deux ans plus tard, de manière naturelle. Son père travaillait comme beaucoup sur les chantiers de construction de la bulle et la mère s’occupait du foyer et, pour arrondir les fins de mois et les angles, jouait les médiatrices dans un centre social de son quartier. Le fils de la famille était un minable étudiant, qui ne semblait jamais devoir sortir du lot.
Zorra, Arthur et ses parents rejoignaient le salon privé d'où émettait Shelley. Iels entrèrent dans la foule des gens biens pincés qui écoutaient avec attention la PDG. Comme par magie... une magie noire qu'Arthur et Zorra savaient devoir à leurs amis, quatre shamans des mondes numériques qui leur avaient ouvert les portes de la réception. Zorra embrassa Arthur et le quitta. La mère décocha à son fils un sourire qui en disait long. Zorra regagna l'ascenseur Ouest de l'arcologie et montait maintenant au cœur de la cité… ou plutôt son cerveau. A côté d'elle apparut l'étrange créature qui l'avait tant effrayé quelques heures plus tôt. « Prends bien soins de mon frère... ne t'inquiète pas, je suis là... personne ne pourra t'arrêter. » Le ghost l'enveloppa de son aura. Zorra eut chaud et froid, puis se sentit totalement apaisé. Le stress qu'elle ressentait il y a encore quelques secondes s'était complètement estompé, comme le brouillard dispersé par le soleil. Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent et elle marcha au milieu des gardes armés sans que ceux-ci ne puissent la voir. Elle arriva devant les portes du sas qui isolait BHL du monde réel. Elle sentit sa main se lever malgré elle et se poser sur le scanner de sécurité. Lorsque les lourdes s'écartèrent, Zorra se retourna et vit le marbre impassible des gardes se fissurer et courir les veines de l'affolement. Ils regardaient en tous sens mais ne la voyait pas.
Shelley avait presque fini de présenter le plan d'action de l'OMC lorsque Arthur prit la parole. « Mensonge! La singularité ne viendra pas. Vous vous servez, vous et tous les dirigeants du monde citoyen de la crédulité du peuple pour l'utiliser comme cobaye de vos expériences. Vous nous dites de ne pas traîner le souvenir de l'homme comme un boulet, mais ce boulet n'est pas le corps mais votre mode de penser. L'évolution se fera en changeant nos mentalité, pas en troquant nos corps charnels pour des corps de donnés. Votre paradis virtuel n'est rien de plus que l'actualisation moderne des paradis antérieur... paradis catholique, artificiel, cathodique ou numérique ne sont que des leurres après lesquels vous faites courir le peuple, tel un hamster dans la roue de son infortune, roue dont vous vous servez pour avancer dans la pseudo linéarité de votre histoire. Nous, maudits hackers, sommes là pour vous faire dérailler. Les roues vont cesser de tourner. »
Sur les écrans et toutes les sources haut-débits du réseau, Antonin, Edgar, Isidore et Charles maniaient maintenant les flux et diffusaient les images qu'ils avaient volé aux services de sécurité de la PDG parisienne. Images qui la donnait à voir en plein CA, planifiant en concertation avec la gouvernance de l'OMC le mensonge qu'elle servirait aux citoyens.
Soudain, les images en directe montrèrent à nouveau le visage de la sexagénaire à la tête de Paris... Mais se tête était maintenant celle d'une furie. Puis par un morphing grossier ses traits laissèrent la place à ceux de la jeune fille numérisé. Son enveloppe charnelle était allongée sur une table d'opération métallique... Shelley eut l'impression de voir sa propre fille puis comprit.
« Ma fille! » cria la mère. Le père retient sa femme dans sa chute. « Qu'est-ce que... ». Arthur reprit: « Voici les parents d'une jeune fille partie il y quelques semaines pour participer à la PT Academy... Elle a été sacrifiée sur l'autel de la numérisation. Elle, au moins, a vu son téléchargement s'accomplir. Mais pour cette réussite, combien de morte dans l'anonymat de disparitions inexpliqués? Mais on ne sait encore quel sera le prix à payer de cette réussite. Pour la jeune fille, évidemment, mais pour nous tous et toutes. »
Au pied de la Tour, dont la couleur d'ivoire prenait de plus en plus les tons rougeâtre des méfaits des puissants qui y étaient installés, la masse amorphe se changeait en multitude excédée puis en peuple en colère.
Un coup de feu retentit. Un garde sortit de sa torpeur venait d'abattre le jeune Arthur. À ce moment précis une explosion se fit entendre depuis la chambre de BHL... L'Intelligence artificielle de Paris venait d'être victime d'une attaque cérébrale. Le cerveau de synthèse perdait sa mémoire vive et Zorra s'en prenait maintenant à la mémoire morte du cerveau superficiel. Shelley pleurait, elle comprenait que les machines qui maintenait sa fille dans une illusion de vie s'éteignaient une à une, avant qu’elle n’ait pu lancer le processus de numérisation. « Soyez maudits! »
La sœur, dont l'avatar multiformes s'était matérialisé aux côté de sa mère disparaissait maintenant dans un sourire, un soupire binaire. Zorra arriva en courant dans la confusion et la cohue. Elle s'approcha d'Arthur... « Je t'aime. Ne chausse pas encore tes semelles de vent, je t’en prie. Ne t'en va pas, reste avec moi! S'il te plaît... » Elle sentit un courant d'air courir sur son épine dorsale puis le visage d'Arthur s'éteignit.
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