Cet été Angelina (sur twitter: @Mespetitesfable ), sur son blog (fermé depuis) Mes Petites fables, a donné l'opportunité à quelques-uns de ses amis manieurs de plumes de présenter une chanson... J'ai répondu à l'appel et c'est sur La Chaleur de Noir Désir que j'ai jeté mon dévolu et mes mots.
La chaleur de Noir Désir
Une de mes chanson préférée du groupe phare du rock français des années 90. Noir Dez c'est cet étrange mixture qui a si souvent réussi à Cantat et sa bande, l'énergie d'un désir chamanique du rock et la noirceur de textes empruntant à la tradition de la chanson française.
La chaleur est un morceau à la structure particulière, pas de couplet / refrain, une chanson qui ne tourne pas en boucle dans la tête encore et encore, une chanson qui traverse l'esprit en ligne droite comme une voiture lancée sur la route poussiéreuse d'un désert où prêche Lautréamont, croisant ça et là quelques squelettes blanchis de bêtes à cornes tapis sous le sable pour se protéger de la lumière aveuglante d'un soleil auquel seul le vol majestueux des charognards fait de l'ombre...
L'intérieur de la voiture s'était transformé en four et le moleskine de ce vieux taxi mordait les cuisses de Maria comme l'aurait fait un gril. Sa robe était déchirée et maculée de sang. Elle pleurait. Ses cheveux noirs n'étaient que le champ d'une bataille, perdue ou gagnée elle n'aurait su le dire. Ça faisait des heures qu'elle roulait, qu'elle fuyait et fumait.Tout avait pourtant bien commencé. Son petit copain était arrivé avec seulement une demi-heure de retard. Comme promis il avait le vieux taxi de son grand-père. Comme promis ils s'éclipsaient pour un week-end chamanique. Un week-end au pays du peyotl, le cactus magique des peuples du nord du Mexique. El viejo, le vieux Pedro les accompagnait. Il avait déjà fait le voyage, souvent. Il serait leur guide. Tous trois avaient avalé du bitume avant que leurs langues ne se chargent de poussière du désert. L'autoradio crachait tant qu'il pouvait des accords âpres comme la lave du Popocatepetl... En route pour la joie.
A un moment ils se sont arrêtés, Pedro avait dit qu'ils étaient arrivés. Ils avaient bu avant de partir trouver le cactus mystique, ou se laisser trouver par lui. Chacun marchait de son côté pour entendre l'esprit de la plante l'appeler. Avec le soir le vent s'était levé, chacun avait de quoi se payer un petit voyage au pays des couleurs criardes comme des néons malicieux. Pedro leur fit offrir de la poudre de peyotl à la terre-mère avant qu'à leur tour ils goûtent les cactées sacrés des huicholes. Maria vomit plusieurs fois tant l'amertume du lophophora était forte. Ils étaient excités, dansaient sur l'éruption sonore qui dégoulinaient en flots de couleurs de la voiture, dansaient sous la voûte étoilée. Comme la musique mourut d'un larsen aiguisé comme une lame, le trio s'enfonça dans un monde de gestes lents et décomposés, passés entre les lentilles d'un kaléidoscope hallucinant. Maria se voyait, prostrée sur le sable encore chaud du désert, roulée en boule sous la couverture froide de la nuit. Les visages de ses deux compagnons s'étiraient comme torturés par des remords immémoriaux. Les étoiles battaient comme le cœur de l'univers et chaque battement se propageait dans toutes les dimensions, comme des bulles de rage muette à travers la nuit éternelle des galaxies. Une de ces bulles allait exploser sous les coups répétés de la réalité.
Ils étaient en phase de descente lorsqu'ils entendirent un coup de feu retentir. Le soleil commençait à peine à réchauffer le sable. Maria avait soif mais ses bras, ses mains ne lui obéissaient que pesamment. Elle était aussi malhabile qu'un enfant découvrant la motricité. Le coup de feu déchira son âme. Pedro venait de s'effondrer devant les yeux de Maria. Une fleur rouge sang éclose sur le front. Elle sentit ses lèvres sèches se décoller, s'ouvrir avec lenteur sans que sa gorge ne se desserre. Un homme approchait, une ombre dans le soleil naissant, avec son chapeau de cow-boy. Maria vit son copain tenter de se lever et s'étaler encore incapable de porter son propre poids. L'homme était à quelques pas. Il s'arrêta. Il portait des santiags. Maria parvint à relever un peu la tête. Elle le vit mettre en joue son homme et l'abattre sans ciller. Elle ne pouvait toujours pas crier. L'homme se tourna vers elle, s’accroupit la regarda longuement. Il la retourna d'un coup de botte et la viola. Puis il recommença. Lorsqu'il eut terminé, il se fit un café. Maria était allongée là, atone, juste derrière lui. Elle sentait monter depuis son ventre un cri. Mais sa voix n'était toujours pas là. Alors ce cri se propagea dans son bras. Depuis de longues minutes les yeux de Maria fixaient la machette de Pedro... « Elle se lève et prend son arme si blanche. C'est pour crever le corps de ce fils de pute si blanc... Pendant qu'il en est encore temps ! »
1 commentaire:
Pas mal. Original, récit sobre et court. Bonne idée les liens wiki.
Amicalement,
@ContesNains
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