"Les grands groupes mexicains se lancent dans la "responsabilité sociale", par Joël Ruet...
Sous ce titre et se prévalant de ceux de chercheur CNRS au Centre d'études français sur
Pourtant c’est vrai, comme l’affirme les enquêtes citées par Monsieur Ruet, l’une de
Revenons alors à l’article de Mr Ruet. Celui-ci renvoie, pour expliquer ces résultats qu’il qualifie d’étonnant « d'abord à la culture, à la limitation (relative) des inégalités, et un peu au fonctionnement démocratique d'un pays dont on parle surtout au sujet de la violence des cartels de la drogue et de l'immigration des plus pauvres vers le grand voisin nord-américain. »
Concernant donc la « culture du bonheur » dont fait état ici le chercheur du CNRS, rappelons tout de même que le Mexique a connu son lot de révoltes, révolutions, soulèvements populaires à travers l’histoire et que le dernier en date et peut-être le plus médiatique, le soulèvement zapatiste au Chiapas dure maintenant depuis 1994 ! Évoquons aussi l’état voisin du Guerrero, qui connait aussi un soulèvement armé, celui de l’EPR, l’Armée Populaire Révolutionnaire... Comme quoi le bonheur affiché par
Plus en avant, essayant de comprendre ce bonheur mexicain, le chercheur fait le parallèle avec une autre étude (du cabinet International Survey Research) qui décrit les salariés mexicains de l’économie formelle (60% des salariés) comme étant les plus satisfaits de monde. Et il pose la question, ces travailleurs heureux font-ils des citoyens heureux ? Il explique alors qu’à la base de ce bonheur salarié et de « l'économie mexicaine, la petite entreprise familiale a une tradition de philanthropie envers les communautés d'appartenance de leurs employés - c'est aussi le cas en Inde, mais seulement dans les grands groupes. » Il explique alors que ces entreprises doivent, de par la constitution fournir « santé, clinique et logement à leurs employés ». Concernant la couverture sociale, je peux dire d’expérience qu’elle est loin d’être automatique et que, de plus, elle se divise en plusieurs niveaux selon le barreau de l’échelle sociale auquel vous êtes accrochés. Et, malgré le temps clément du pays, la finesse de la couverture en question laisse mourir bien des hommes et des femmes de ce pays. Il faut aussi prendre en compte que lorsqu’on a le « seguro popular », la sécurité populaire, le premier barreau de l’échelle de la santé, on s’entasse souvent dans les « centros de salud », les centres de soins où il ne vaut mieux pas avoir quelque chose de sérieux. Les femmes par exemple, ne sont pas à l’abris d’une pause « surréaliste » du sterilet ! Les médecins qui suivent les nouveaux nés passent souvent plus de temps à parler de la pluie et du beau temps (ou de
Quant au logement, il est certainement fait ici référence aux cubes préfabriqués tels que ceux qui moins d'un an après leur inauguration à Aguascalientes étaient inondés. La périphérie de la ville a ainsi vu fleurir des quartiers résidentiels tracés au cordeau qui ressemblent plus à des casernes qu’au paradis du travailleur. J’ai eu l’occasion d’interviewer des habitants de ces préfabriqués, qui même avec le sourire reconnaissent que c'est loin d'être la panacée... surtout quand on n'a pas la nostalgie du capitalisme paternaliste qui semble faire rêver notre chercheur de bonheur.
Quant aux conditions de travail des Mexicains, je me contenterais de dire que beaucoup de ceux que je côtoie sont obligés de cumuler les emplois pour finir les fins de mois... qu’avec la crise le chômage a empiré et que l’économie informelle fait ici vivre beaucoup de monde...
La suite de l’article de Mr Ruet donne ensuite une vision idyllique des entreprises mexicaines, qui non contentes d’être des pères pour leurs employés, serait aussi une bonne mère-nature puisqu’elles seraient en pointe sur les questions de protection de l’environnement. Hormi que ce long passage de l’article ne donne la parole qu’aux statistiques et enquêtes patronales, l’auteur de l’article ne fait aucune références aux luttes de nombreuses associations environnementales contre ces « entreprises responsables ».
Mais revenons sur l’idée d’un pays "démocratique" pour expliquer « un peu » le bonheur des Mexicains... Un pays qui ne ferait parler de lui que par ses migrants et la violence des cartels de la drogue. Je dois dire que c’est certainement l’argument le plus choquant dans un pays où les droits fondemmentaux sont baffoués quotidiennement... et pas uniquement par les cartels de la drogue mais aussi par les forces de police et l'armée qui patrouille dans les rues, comme dans ces reportages des années 70' et 80' sur l'Amérique Latine des dictatures. Demandez à Florence Cassez ce qu’elle pense du fonctionnement démocratique de la justice mexicaine... pour prendre un exemple connu des francais. Demandez aux mortes de Ciudad Juarez et à leurs familles ce qu’elles pensent de la démocratie mexicaine... Je laisse le lecteur seul juge en donnant ici quelques exemples récents du fonctionnement démocratique du Mexique :
- Mardi, à Ciudad Juarez, un commando armé a tué un groupe de 8 adolescents qui avait eu l’imprudence (impudence?), de sortir dans un bar, la nuit. C’est vrai qu’en démocratie, il faut savoir se coucher tôt pour aller le sourire aux lèvres travailler dans la joie et la bonne humeur et que ces gredins n’avaient certainement rien à faire dans un bar aussi tard !.. Certainement que les habitants de la malheureuse France, découvriront la joie et le bonheur eux aussi grâce au "travailler plus pour gagner plus" de leur bien-heureux président.
Mais peut-être, me rétorquerez-vous que Ciudad Juarez est une enclave narco dans un pays où règne la paix et l’harmonie... Alors rendons-nous à Oaxaca, cet état indigène du sud du pays au charme reconnu par les touristes du monde entier...
- Prenez note... certainement que ces deux personnes sont mortes de rire, tant le bonheur prend ici aux tripes... Les deux victimes, Alberta Carino, 35 ans, de l'association de développement local Cactus, et Tyri Antero Jaakkola, 25 ans, de l'ONG finlandaise Uusi Tuuli Ry ("Vent nouveau"), sont tombés sous les balles de paramilitaires qui contrôlent une zone de l’état de Oaxaca. Ces deux personnes faisaient partie d’une caravane humanitaire qui devait apporter vivres et médicaments à San Juan de Copala. Ce village indien s’est proclamé autonome il y a peu et a vu, en représailles, son accès (ainsi que l'eau et l'électricité) coupé par des militants de l’Ubisort (Union du bien-être social de la région de Triqui), proche du PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel) au pouvoir dans l’Oaxaca. D’autres militants et journalistes qui faisaient partie de la caravane ont également disparu, dont au moins un Allemand. Plusieurs rescapés parlent d’autres morts, dont les corps auraient été cachés par les paramilitaires. Précisons aussi que la police elle-même a les pires difficultés à enquêter puisque les paramilitaires leur refusent l’accès à la zone qu’ils contrôlent... Peut-être que je cherche la petite bête, puisqu’on peut noter que les paramilitaires, responsables de ces assassinats ne font que se battre pour le "bien-être social"... une cause qui ne laissera certainement pas indifférents les auteurs des rapports sur le bonheur des Mexicains !
- Parlons alors d’un évènement, plus proche de moi... J’avais ici-même relayé l’info... le cirque Alegria organisait dimanche dernier une parade anti-corrida en plein cœur de
Photos: Défilé anit-corrida dans les rues d'Aguascalientes et le dispositif policier qui l'entourait... par Hélène Michoux.
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