"La plume est la langue de la pensée"
Miguel de Cervantes Saavedra

31/12/2019

Révolte sociale, le Chili en première ligne


Première ligne,

les héros anonymes de la résistance au Chili

 

Depuis le 18 octobre, le Chili connaît le mouvement social le plus important depuis la fin du règne de Pinochet. C’est l’augmentation du prix du ticket de métro qui a mis le feu aux poudres. Le président Piñera a retiré sa mesure, mais la fronde n’a fait que s’amplifier, nourrie par l’accroissement des inégalités sociales et une démocratie toujours et encore confisquée par une classe politique ne représentant qu’elle-même. La répression est féroce, des centaines de manifestants ont été énucléés par les LBD et près de 40 personnes sont mortes. Pourtant les manifestations et émeutes se poursuivent et ont vu apparaître de nouveaux héros et héroïnes, celles et ceux qui forment la « première ligne ».

 

source: https://desinformemonos.org/primera-linea-los-heroes-anonimos-de-la-resistencia-en-chile/

Photos, Gerardo Magallón / texte, Gloria Muñoz Ramírez / traduction du Serpent@Plumes

 



Santiago du Chili. La première ligne des manifestations dans la capitale chilienne est devenue l’emblème des mobilisations. Envers et contre tout, ce sont les héros et héroïnes de la protestation qui la forment. Dans les médias, ils sont appelés vandales, clochards, délinquants. Dans les manifestations, ils sont applaudis, acclamés, presque hissés sur les épaules. Ils existent.
Ils sont des centaines d’hommes et de femmes, jeunes dans leur majorité, à, chaque jour, affronter les carabiniers. Ils se regroupent autour des points stratégiques afin d’empêcher les gaz lacrymogènes, les tirs de munitions et les jets d’eau avec des produits chimiques, d’arriver jusqu’à la mobilisation pacifique. Ce sont les gardiens et gardiennes des dizaines de milliers de personnes qui depuis plus de 40 jours protestent dans les rues contre un système qui les exclue.


Le coin de Ramón Corvalán et de la rue Carabineros de Chile est l’un des camps de l’inégale bataille. Des pierres contre des blindés, de ceux qui tirent des munitions ayant rendu borgnes plus de 200 personnes, ou des bombes lacrymogènes ou les véhicules appelés canons à eau qui envoient des jets d’eau avec des agents chimiques, qui lacèrent, laissant la peau brûlante pendant des jours. Le Chili est expert dans ce genre de bassesses.
Les nuits sont un bouillonnement. D’un côté des groupes de jeunes cassent le bitume à la masse afin de ravitailler en pierres la première ligne. Des files de garçons avec des sacs de béton traversent les rues et les laissent à celles et ceux qui résistent aux attaques frontales des carabiniers. « Merci, frères », entend-on depuis les échauffourées et la fumée. Car oui, la première bataille remportée le fut contre l’individualisme et l’ego, ici tout est collectif.


Des dizaines, des centaines de personnes attendent les manifestants qui courent avec les yeux en larmes. « Eau avec du bicarbonate ! Eau avec du bicarbonate ! », crient-ils. Et les autres s’approchent pour qu’ils leur aspergent le visage, leur disent quelques mots de réconfort, les secourent. Pour chaque personne blessée, ils sont quatre ou cinq à s’approcher immédiatement. C’est un jaillissement.
La première ligne continue. Alors que le ciel s’obscurcit, des manifestants se regroupent face au canons à eau et aux blindés et les gênent avec la lumière verte des rayons laser sur les pare-brises. Le son et lumière inonde la rue. Le canon à eau recule. Les jeunes crient de joie.
Très vite l’infanterie carabinière, à pied, se déploie. Abritée dans les véhicules, elle reçoit l’ordre d’attaquer et ils courent après les jeunes et tous ceux qu’ils croisent sur leur passage. Ils frappent et donnent des coups de pieds à tous ceux qui s’interposent, ils en arrêtent quelques-uns et leurs compagnons essayent de les secourir dans une bataille au corps à corps. Parfois ils y parviennent. D’autres, le garçon ou la fille va grossir les files dans les commissariats. On parle maintenant de plus de 17000 détenus en 40 jours de protestations.


Claudia Aranda, reporter et activiste à temps complet, arrive en première ligne. Au cours de notre rencontre, elle reçoit par whatsapp l’échographie de son prochain petit-fils. Elle est heureuse. Il y a 40 jours elle a tout quitté et est partie vivre dans un squat pour se rendre disponible tout le temps. « La tante de l’eau », l’appellent ses milliers de nouveaux neveux des rues. « Hydratez-vous, canaille ! », leur crie-t-elle avec son bidon de cinq litres à la main. Dans son sac elle transporte son laser pour les moments où il faut désorienter les carabiniers, et son carnet et appareil photo, pour ses chroniques.
À l’autre coin de la scène, des groupes de jeunes tentent de faire tomber un feu de signalisation. Avec une corde ils le tirent pour le faire tomber au sol et faire du poteau une barricade. Des dizaines de coins de rues n’ont plus aujourd’hui de feux, c’est pour cela qu’un autre groupe de volontaires régule le trafic, recevant pour paiement le son des klaxons des automobilistes qui, de la même manière leur offrent une bouteille d’eau ou quelque chose à manger. 


Des dizaines de médecins, infirmiers et psychologues couvrent les points de santé. Ils arrivent ici dès la fin de longues journées de travail dans les hôpitaux publics et prives, et pendant des heures ils s’occupent des blessés de la révolte. On dirait, disent-ils, que chaque fois ils mettent des agents chimiques plus agressifs dans l’eau que lancent les carabiniers. Ces derniers jours les gamins arrivent avec des brûlures sévères de la peau.
Une jeune qui travaille comme organisatrice d’événements est maintenant chargée de la logistique au centre de santé. Elle reçoit et classe les dons des gens : masques, analgésiques, bandages, sérum, et une infinité d’articles qui s’amoncellent sur le côté. La solidarité, pour l’instant, est plus grande que l’urgence.


Dans la première file, les jeunes se protègent avec des boucliers faits de plaques arrachées aux rideaux des magasins, avec des couvercles de tonneaux, avec ce qu’ils ont. Ce sont quelques gladiateurs. Il y a des hommes et des femmes « pompiers » dont la mission consiste à étouffer les bombes lacrymogènes avec des bonbonnes d’eau, de bicarbonate et de soude caustique. La pire partie est pour eux, leurs poumons se remplissent de toxines. Les applaudissements de leurs compagnons sont leur seul paiement pour chaque bombe désactivée.
Dans la manifestation personne n’a faim. Et moins encore en première ligne; des cuisines collectives s’organisent et distribuent la nourriture dans des charriots récupérés dans les supermarchés. On ne manque jamais de lentilles et de patates. Parfois des contingents de cyclistes arrivent avec de quoi aider, d’autres fois c’est eux qui ont besoin d’aide.


Que se passerait-il si cette première ligne n’existait pas ? Il y a quelques jours une marche organisée par les maîtresses de maternelle essayait d’arriver Place de la Dignité, connue auparavant comme Place d’Italie, le centre névralgique des mobilisations, et face à elles déboulait la police avec des lacrymogènes. La première ligne sert à ce qu’elles et beaucoup d’autres comme elles puissent accéder à la place et manifester pacifiquement.
Les frondes et baïonnettes improvisées sont les armes de la première ligne. Barricades de pierres, planches, pneus, tout ce qui peut servir à obstruer le passage des carabiniers, dont la mission est de temps en temps rompre cette ligne, traverser les barricades, ouvrir le passage et pourchasser les manifestants. Depuis plus de 40 jours la mécanique est claire. Ils brisent la ligne, les jeunes se font tirer dessus, ils se dispersent et puis reprennent leurs positions. Jusqu’à la prochaine attaque. Et ainsi de suite.
« Embuscade ! Embuscade ! », crient-ils lorsque arrivent des deux côtés les canons à eau. Il n’y a pas grand-chose de plus à faire que se baisser et se protéger avec les corps. Ils se préviennent aussi lorsque l’un d’entre-eux est sur le point de lancer un cocktail molotov. « Mèche ! Mèche ! », crient-ils pour que leurs compagnons ouvrent un espace. La bombe artisanale vole dans les airs et tombe près des carabiniers. La joie se diffuse, cela leur offre un temps pour se rapprocher des carabiniers et continuer le combat avec les pierres.


La bataille est organisée. Certains vont à l’affrontement, d’autres construisent des barricades, d’autres regroupe le matériel, certains amènent la nourriture et l’eau, et d’autres s’occupent des blessées. Tout cela pour que le reste de la mobilisation contre un système qui les prive du plus élémentaire puisse avancer sans trop de difficultés.
Au milieu de la bataille jamais ne manque la batucada ou un saxophoniste qui s’approche avec « El derecho de vivir en paz » et imprègne l’ambiance de ses notes. La nuit tombe et les blocages s’éteignent peu à peu. Dans les rues sombres apparaissent des groupes de carabiniers qui patrouillent. Et, tel un fantôme, entre les ombres, on entend des cris : Miliciens de merde ! Jeunes de merde ! Assassins ! Une jeune fille avec une énorme pierre à la main passe près des rangs de carabiniers. Elle les insulte, cachant la pierre. Les carabiniers continuent. Et elle aussi.


04/12/2019

Préférer à la patrie des frontières, la matrie du sous-sol indien de l'Amérique


Je continue à propos de la Bolivie, avec la traduction d'une interview de Silvia Rivera Cusicanqui (dont j'avais déjà traduit une intervention). C'est une parole forte, une voie féministe vers l'autonomie, une voix dissidente dans un pays polarisé, dans une Amérique Latine entre populisme de droite et de gauche. Une pensée indigène qui veut substituer à la patrie des frontières, la matrie du sous-sol indien de l'Amérique, où fonder de nouvelles autonomies.



La société bolivienne « n’a pas renoncé à ses droits, à sa mémoire et à son autonomie » : Silvia Rivera Cusicanqui

La Paz, Bolivie. Silvia Rivera Cusicanqui, penseuse, féministe et activiste bolivienne, parle dans un entretien avec Desinformémonos de la complexe conjoncture actuelle de ce pays andin. Celle-ci commence avec ce qu’elle appelle « la négation de la fraude » de Evo Morales lors de sa quatrième réélection. Elle explique le machisme, le racisme et « l’interculturalité » durant les 13 années de gouvernement du MAS. Elle parle du capitalisme en Bolivie, de la pensée unique et la disqualification de la critique des gouvernements progressistes, et de sorties à partir d’en-bas pour la reconstruction de la Bolivie, entre autres thèmes.
L’entrevue a été réalisée dans sa maison de La Paz, le 22 novembre, un mois et deux jours après les élections présidentielles et 12 jours après le gouvernement de fait de Jeanine Áñez, au milieu de la polarisation et de la conflictualité politique du pays.
- Vu de l’extérieur, on ne parle que de l’existence du binôme MAS ou extrême-droite en Bolivie. Existe-t-il un entre-deux ?
- Le fait qu’on ne perçoive que l’extrême-droite et le MAS, est une construction. Tous les secteurs intermédiaires, nous, nous avons été privé de parole. Il n’existe pas en castillan une idée de médiation aussi intéressante que celle qu’il y a en aymara : le fait que dans une opposition se crée un espace Taypi qui articule les différences, et pour peu que tu fasses un pas de côté tu dois arriver dans un espace où la polarisation ne génère pas d’impossibilité sociale, de blocage mutuel. Ça, je l’ai vécu dès 1971 dans des communautés quechuas et aymaras. Mais aujourd’hui, les mots de médiation et d’intermédiaire, et de paix sont devenus des clichés.
Moi je crois possible de nous entendre depuis ces notions aymaras, quechuas, guaranis. Il y a beaucoup à discuter à propos de démocratie dans nos propres manières de faire les choses, qui ne suivent pas toujours le perfectionnisme linguistique.
- Quel système a été implanté par le MAS au pouvoir ?
- Parfois on parle d’un capitalisme andin, amazonien, mais c’est un projet capitaliste lié au BRICS, Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Mais, de plus, il est totalement lié à l’Initiative pour l’Intégration de l’Infrastructure Régionale Sud-américaine (IIRSA). Ça c’était un projet de la banque mondiale qui se cachait derrière l’Unasur en 2010 et qui devient IIRSA-COSIPLAN. Moi je l’appelle le Plan Condor contre l’Amazonie et contre les basses terres.
C’est l’alliance militaire en marge de la possibilité d’un Lula, d’un Bolsonaro, d’un Evo ou de n’importe qui d’autre. C’est une question systémique, avec un énorme lot de routes, de barrages, tous reliés à ce qu’on appelle le sous-impérialisme brésilien qui fut dans le temps l’une de nos thématiques, à l’époque des dictatures. Et ça, ça a été totalement effacé et oublié. Les gens ne se souviennent pas que ce pouvoir brésilien est lié au capitalisme et à l’obstination du lien avec la Chine, qui est un facteur fondamental d’expansion du capitalisme au Brésil et dans toute l’Amérique.
- Quelle est la forme du capitalisme en Bolivie ?
Je le regrette, mais il n’a pas la forme entrepreneuriale qui paye des impôts, plutôt des formes corrompues, de bourgeoisies pour qui tout s’achète. Et bien évidemment, en son centre on retrouve les producteurs de soja, de biodiesel, de bois et tous ceux qui veulent en finir avec les arbres pour faire de tout ça une partie de la République du soja ou de la palme africaine. Cela démontre combien est archaïque le modèle de développement qui a été installé dès avant le Mouvement vers le Socialisme (MAS) et qu’a poursuivit le MAS, mais recyclé avec cet utilisation symbolique puissante et avec un facteur de redistribution de pouvoir et de redistribution économique.
On parle d’une redistribution très tendancieuse. Ma fille a eu deux enfants à la maison avec une sage-femme aymara merveilleuse, une érudite. Mais aujourd’hui ma fille ne peut plus recevoir l’Assurance Universelle Maternelle Infantile (SUMI) car pour cela elle doit aller à l’hôpital, et que si tu refuses, tu travailles contre l’État. Mais n’es-ce pas, par hasard, pluriculturel, un accouchement avec une sage-femme aymara ? Ça l’est, et pourtant elle n’a pas le droit au SUMI. Mes petits-enfants ont grandi avec tout ce que le travail de ma fille a pu générer pour acheter amandes, châtaignes, toutes ces bonnes choses qu’on retrouve dans ces lots de subventions.
La subvention est alors un processus disciplinaire. Toutes les formes de bonus ou de subventions ont ce facteur disciplinaire, et ça me semble tout à fait sinistre en tant qu’État central, parce que ça n’a rien de plurinational. C’est une forme très étudiée, très intelligente, de créer un paravent idéologique permettant aux gens de confier leur subjectivité à ces entités qui pensent tout savoir. Et pour moi, cela est très centré autour du personnage d’Álvaro García Linerai et ses nostalgies de guérillas et du pouvoir, de toute une vie personnelle qui me semble mériter non seulement une analyse journalistique, mais aussi psychanalytique et sociologique.
Je suis profondément peinée en disant cela, parce qu’il y a des êtres humains masculins, merveilleux, rempli d’amour pour leur famille, qui n’utilisent pas leurs enfants pour faire de la politique, et qui de mon point de vue sont aussi un espoir dans les communautés. Mais le fait d’avoir privilégié une masculinité agressive, séparatiste vis à vis de la communauté, de cela la croissance des options évangéliques, de Chi, jusqu’à Camacho et Jeanine (Áñez) est également responsable.
Le paravent prétend qu’ici, maintenant, tout a été dit, tout a été fait, il y a un ministre gay, il y a des lesbiennes, et ainsi l’État a été assaini de tout son monolithisme. Mais non. La vie quotidienne n’a en rien changé, et c’est ce qui a explosé, parce qu’ont infusé la frustration, la désespérance, la rage. De plus, face au féminisme a également infusé la question que nous ne pouvons rien faire parce qu’il y a beaucoup de pouvoir distribué dans les strates masculines, et ce pouvoir continue d’être utilisé de manière obscure, mauvaise, très tendancieuse, bien loin du bien commun. On a perdu l’idée d’un bien commun comme un bien local, sur le terrain, dans la communauté, dans le quartier, et c’est devenu le bien public, où l’État définit les besoins des gens.
Ce qui a été redistribué n’est ni bien utile ni vraiment durable. Il y a donc un problème structurel, et c’est pourquoi je pense que les femmes pleurent en ce moment, mais tout en s’activant, en repensant nos communautés, nos réunions, nos quartiers, et dialoguant et exerçant un droit à la dissidence.
Lorsqu’on eut lieu les conflits, moi j’étais malade, et tout le monde sortait des drapeaux. Dans mon quartier c’est le drapeau bolivien. Moi j’ai sorti un drapeau noir, car j’enterrai une illusion, celle d’un État plurinational. Aujourd’hui nous tâchons de créer les bases pour la reconstruction du pluriel depuis en-bas, depuis les communautés, depuis chaque syndicat, depuis chaque réunion. Dépasser le racisme, dépasser la peur de l’autre, dépasser la binarité et redonner la parole à celles et ceux qu’on fait taire, afin de retrouver la possibilité d’une structure pluriel d’organisations sociales. Je ne parle pas de ces sois-disant mouvements sociaux qui génèrent une relation totalement verticale, comme la Coordination Nationale pour le Changement (Conalcam) de Bolivie, où les femmes servent de décorations.
La Conalcam était le moyen de retirer aux bases toute la pluralité qui avait permis qu’on débatte des autonomies. Les guaranis du parc Kaa Iya ont développé une proposition incroyable de relation avec les groupes non contactés, avec les gardiens du miel. Résultat ? Tout ça est cramé. Où est-ce cramé ? Dans tous les lieux contrôlés par l’Agence pour le Développement des Macro-régions et Zones Frontalières - ADEMAF.
Et rapidement le feu s’allumait, du parc il tombait sur l’extrême sud-est du pays jusqu’au parc Madidi, qui est à l’extrême nord-ouest. Il y a une frontière, frontière où je crois qu’il y a eu une incitation au feu, parce que c’est moins cher de brûler que de sortir les arbres à la force du poignet ou avec des machines. C’est pour ça que je pense que derrière ça, d’une certaine manière invisible dans cette conjoncture, on retrouve le Plan Condor contre les basses terres.
- Parlons du discours sur le racisme d’Evo Morales.
- Si toi, en tant qu’État, tu tombes dans une politique d’éducation pour la rage, pour que le ressentiment fleurisse et affleure en tant que rage, tu vas générer des organismes ou des organisations arbitraires. L’accumulation des arbitraires dans chacune de ces localités, la corruption des maires, les syndicats liés à des choses plus ou moins louches, les questions de misogynie, les scandales sexuels de dirigeants et de conseillers municipaux. C’est une accumulation de faits. Et les gens du commun vont dire « ces indiens masistesii ». Ils ne représentent pas tout ce que sont les bases du MAS, mais s’est accumulée une rage contre ces arbitraires systématiques que donne le pouvoir arbitraire, parce que ce n’est pas un pouvoir qui vient d’en-bas, ce n’est pas un pouvoir faire, c’est un pouvoir de domination, de contrôle.
Le contrôle est presque une exigence d’État. À certains endroits il y a eu négociation, mais à d’autres il s’agissait systématiquement de discipliner et, sinon de diviser l’organisation. C’est ce qui s’est passé sur le Territoire Indigène et Parc National Isiboro-Sécure (TIPNIS) et partout. À Totora Marka les maris l’ont emporté sur les femmes au sujet de l’autonomie, les autonomies existantes ont été énormément mises sous tutelles. Mais nous sommes sur le point de les récupérer.
Il y a, au-dessus de nous, quelque chose de très sérieux, c’est un secteur de la droite qui est revanchard. C’est pour moi une manière d’attiser aussi le racisme. D’un côté il y a les gens du commun qui enragent face à l’arbitraire du pouvoir distribué aux secteurs populaires, et eux, qui sont et restent les secteurs populaires et qui ont renié ces formes arbitraires ; et de l’autre côté il y a le ressentiment accumulé par les oligarchies suite à la perte du pouvoir et de l’influence publique, et ça c’est du revanchisme.
- Evo Morales et Alvaro Garcia ont déclaré au Mexique qu’ils avaient été expulsés pour avoir gouverner pour les indiens.
- Le racisme se niche également au sein du MAS. Pour moi c’est raciste de dire à un rassemblement indigène que le soleil va se cacher et que la lune va s’échapper si ils ne votent pas pour eux. Ça c’est croire que les gens sont idiots. De plus il ne l’a jamais dit en aymara, il ne l’a jamais dit en quechua, c’est une allocution tronquée, parce qu’il parlait et il y avait un médiateur qui traduisait et qui a possiblement traduit de façon biaisée. Pendant ce temps il n’y a pas de possibilité pour la population indigène de parler ses propres langues et penser avec sa propre tête au sien de n’importe quelle instance publique, et ça c’est mauvais.
- Pourquoi l’indien est-il vu, et traité par le pouvoir, comme un pauvre ?
- Il y a toute une stratégie mondiale que j’appelle le misérabilisme, qui dit qu’être indien équivaut à être pauvre et que pour cette raison il faut tout lui donner, et tout lui apprendre car il ne pense pas. La pensée qui se niche chez les gens du commun, qu’il parle ou non une langue natale, est nourrie d’une expérience de vie qui fait que ses idées ont un ancrage et qu’elles expriment des choses puissantes. Moi, je me nourris de ça. La pauvreté, appelée ainsi en ce qui les concerne, est pour moi une richesse oubliée, une richesse niée.
- Qu’est-ce qui se passe quand on critique un gouvernement progressiste ? Pourquoi les qualificatifs de traîtres, de vendeur de la patrie, de droitard pour ceux qui se questionnent ?
- C’est une gauche archaïque qui nous accuse, une gauche qui en plus a pour ambition de représenter les indiens sans les connaître. Une gauche masculino-centrée qui a entraîné tout le monde à se sentir honteux d’avoir une pensée critique. J’appelle ça la nouvelle pensée unique. Le cas bolivien entretient une relation très forte avec une coalition de gauches continentales liées à ce qu’on nomme les progressismes, qui ont des remords parce qu’ils sont procapitalistes, et qui, par exemple, veulent faire une centrale nucléaire à El Alto, où il y a une faille géologique, mais en réalité ils veulent l’uranium.
Les journalistes qui ont le devoir d’enquêter sur ce que font ces BRICS en Amérique Latine et sur leur façon de faire pour que les progressismes fassent en sorte que leurs investissements ne soient pas remis en question par le peuple. Ça se fait à travers les manipulations symboliques. Les gens doivent se souvenir de la manière dont des porte-paroles blancs, qui ne parlent pas les langues natives et qui font d’importants investissements, ont fait taire les personnes indigènes dans les forums publics.
Qui sont ceux qui rentrent dans ce schéma capitaliste ? De quelle couleur sont-ils ? Quel langue parlent-ils ? Et on va se retrouver avec la même structure que toujours.
- Quelle relation entretient ce que tu viens de décrire avec ce qui se passe en Colombie, en Équateur, au Chili…
- Moi, je fais partie de celles qui regardent depuis en-bas. Avec le Chili, il y a des aymaras des deux côtés de la frontière et tout un processus de désirs de quelque chose de différent. Au Chili il y a une cordillère qui est toujours menacée par ces BRICS et par tous les investissements néfastes, tel des parcs éoliens et autres projets. Il se passe la même chose avec l’Argentine, de même en Bolivie. Ici, nous n’avons pas de nations, nous avons des régions, des territoires. Moi, j’appelle tout cela la matrie. La patrie ce sont les frontières, la matrie c’est le sous-sol indien de l’Amérique, de notre continent. C’est dans ce sous-sol que nous devons poser les fondations des nouvelles structures politiques, le plus loin possible.
- Crois-tu qu’il existe en ce moment en Bolivie un espace pour cette construction depuis en-bas ?
Tout ce que tu aimes demeure, comme le dit Ezra Pound. Ce que tu aimes, les gens, la vie, perdure. Au milieu de l’incendie refleurissent de petites plantes. Nous sommes en train de reconstruire ce tissus abîmé. Il y a un texte au Musée d’Anthropologie qui dit que notre vie s’est transformé en un réseau de trous, selon un poète anonyme nahuatl. Ces trous nous devons les raccommoder, et ce raccommodage ce sont les collectifs, les collectives, et les petits groupes, les quartiers et les petites associations et coopératives qui le font. Chaque jour nous tissons plus de liens.
Nous avons mis en place les veillées palabrementaires, et nous allons continuer car cet imaginaire est en train de se multiplier. Les Mujeres Creando ont créé le Parlement des Femmes, mais il y a également je ne sais combien de parlements convoqués partout où il y a des femmes, des hommes, des grand-mères, des nonnes. Cette société n’a pas renoncé à ses droits, à sa mémoire, à son autonomie, et au fait que l’indien est en chacun de nous. Nous n’allons pas renoncer ni retourner en arrière, il y a 17 ans.
Je dis bien 17 ans, et non 14. L’Agenda d’Octobre comportait un quatrième point : nous auto-représenter sans l’intermédiaire de partis politiques. Mais ce qu’a fait dernièrement le MAS, à l’apogée de son abâtardissement, c’est de faire une loi pour les partis politiques où on ne vote plus de façon uninominale et où il n’y a plus d’associations citoyennes. Il devrait y avoir un ayamara à la cour électorale. Chez moi, le candidat c’est Williams Bascopé, civil de La Paz, né à Santiago de Okola, une région sacrée du lac Titikaka, également locuteur de l’aimara mais avocat constitutionnaliste. Ceci est un exemple, mais il doit y en avoir beaucoup d’autres.
Il est nécessaire de rompre avec cette loi absurde d’élections primaires et de partis politiques et reprendre, bien que ce soit boiteux, la loi précédente qui donnait aux associations citoyennes la possibilité d’avoir une personnalité juridique et la capacité de décider de bien plus de choses depuis en-bas. Comme ils ont vu qu’ils ne pouvaient plus contrôler cela, car ce n’était pas entre leurs mains, alors ils ont imposé le monopole du parti.
Au début de leur gestion, Alvaro et Evo disaient que le MAS n’était pas un parti, mais une articulation de mouvements sociaux, quelque chose dont l’histoire a démontré qu’il n’en était rien. C’était tellement un parti et tellement archaïque qu’il n’y avait même pas de démocratie interne. Ils faisaient leur petite cuisine et ils distribuaient le discours, et ensuite les organismes entre information, communication, presse, radio, se chargeaient de générer une conscience revancharde.
- Qu’est-ce qui a plongé la Bolivie dans cette crise politique actuelle ?
- Ce processus vient de la fraude et de la négation de la fraude. La négation de la fraude a quelque chose à voir avec la distribution échelonnée de l’information. Il y a des endroits où rien d’autre n’arrive que le canal 7iii et les chaînes de l’extérieur entièrement distractives, mais cette information va entrer dans la conscience. Si à cela on ajoute que le vice-président, en son temps, avait dit qu’ici le soleil allait disparaître et la lune se cacher si Evo ne gagnait pas, et ce n’était pas juste des paroles, ils venaient aussi avec des tas de cadeaux. On disait ça et ils offraient des cuisines ou des terrain de gazon ou n’importe quoi d’autre, une véritable campagne de prébendes.
J’ai distingué trois formes de fraude qui ont fonctionné, dont deux d’entre-elles notoirement lors de l’élection précédente. Lors de l’élection précédente il y avait ce que j’appelle une fraude de prébendes, c’est à dire qu’en échange du vote ils offre des cadeaux. Le deuxième type c’est la fraude coactive, où c’est le syndicat qui dit qu’ici tous votent comme ça, les femmes se taisent, il n’y a pas de délibération. C’est le contrôle du vote, où les gens sont obligés de montrer qu’ils ont voté. « Si vous votez à 100 % je vous donne tout ce que vous voulez », a dit Morales, et le « tout ce que vous voulez » faisait briller les yeux des dirigeants, mais ce n’était que des principes symboliques.
La possibilité de donner de bonnes choses aux communautés, comme un système de sauvetage de semences ou un système pour l’eau, n’a pas été réalisée. Tout ce qu’on a vu ce sont des terrains, des stades, des choses ornementales qui ont tout à voir avec des biens de prestige. Et ainsi, si une communauté possède un stade, l’autre veut un autre stade, même si il ne doit y passer que quatre chats, rien de plus. On a généré une culture de l’État paternel, de l’État qui te donne tout.
Tout cela est donné grâce à l’argent du gaz, qui est le produit d’années de lutte et de collectivités entières qui ont cherché à ce que ces ressources soient portées sur la formation d’une société harmonieuse, forte, belligérante, capable de vivre par elle-même. Les collectifs de l’eau, des semences, les gens qui travaillent pour que les gens aient foi en leur propre capacité de gérer leur vie, leurs ressources, c’est tout ce qui a été systématiquement retiré aux gens durant des années. Il y a une idée masculine répandue qui dit qu’il n’y a pas d’autre forme qu’un État qui te donne tout. C’est pourquoi il doit être centralisé, et pour cela l’autonomie indigène doit être mise sous tutelle, c’est pour ça que celui qui s’oppose est antipatriote, antinational. L’idée du nationalisme a fait beaucoup de mal parce qu’à chaque frontière, il y a un peuple indigène qui se retrouve des deux côtés.
Le troisième niveau de fraude c’est l’informatique, c’est l’actuel. Avant ça existait déjà, mais c’était de la micro-fraude, parce qu’ils faisaient voter quelques morts, quelques femmes retraitées ou je ne sais qui. Selon moi, aujourd’hui la majorité parlementaire est le produit de l’addition de ce genre de fraude. L’autre chose qui me semble avoir été très astucieux, c’est que tout espace intermédiaire au parlement, en tant que potentialité, a été nié et rogné. On a refusé toute personnalité juridique à tous ceux qui n’étaient pas d’extrême droite. L’extrême-droite sert à polariser le pays et à prétendre que rien d’autre n’existe.
Je considère Carlos Mesaiv (le candidat d’opposition à la présidence, pour Comunidad Ciudadana) un peu à côté de la plaque quant à ce qui a cours dans le pays, mais il a fait un effort en s’alliant au PRIN (Parti Révolutionnaire de la Gauche Nationaliste), même si de manière insuffisante, de façon à ce que le MAS a pu dire que c’est la droite et que prospère ainsi l’idée du coup d’État, avertissant que si Carlos Mesa devait gagner s’en serait fini du soleil, de la lune, de l’eau, du gaz et tout. La campagne a vraiment été sale.








i Homme politique bolivien, il fut élu vice-président à l’élection de 2005 d’Evo Morales, puis réélu en 2009, 2014, ainsi qu’en 2019 lors de la réélection contestée de Morales en 2019 et qui ont débouché sur son exil au Mexique en compagnie du président et sur les évènements en cours depuis.
ii Partisans du MAS, Mouvement Vers le Socialisme, parti d’Evo Morales.
iii Chaîne de télévision publiques bolivienne, critiquée pour sa proximité avec le pouvoir.
iv Homme politique bolivien, il fut vice-président de Gonzalo Sánchez de Lozada, avant de lui succéder à la présidence suite à la guerre du gaz en 2003. Vice-président, il porte une responsabilité dans la répression des mouvements sociaux contre la privatisation du gaz, qui fit 80 morts et 500 blessés.

22/11/2019

Toujours à propos de la Bolivie

Une nouvelle traduction du serpent@plumes concernant ce qui se passe en Bolivie. C'est encore une voix féminine, une voix indigène également qui s'exprime ici, à travers la voix d'Adriana Guzmán, pour le média Pie de Pagina.



« Ce n’est pas un coup porté à l’État, mais aux peuples »



Adriana Guzmán, féministe communautaire aymara, prévient : ce qui se joue en Bolivie, ce n’est pas le siège présidentiel ou le retour d’Evo Morales, mais la volonté d’une nouvelle colonisation des peuples indigènes. Elle questionne le féminisme qui, depuis l’université, est incapable de regarder un mouvement indigène, et elle envoie un message au Evo : « les morts ne se négocient pas ».
Source : https://piedepagina.mx/este-no-es-un-golpe-al-estado-es-a-los-pueblos/







Depuis dimanche dernier, lorsque Evo Morales a annoncé sa démission en tant que président de la Bolivie et le tout provoqué par un coup de force militaire, Adriana Guzmán Arroyo a commencé à envoyé des messages audios décrivant ce qui se passait dans son pays : « Ce coup n’est pas seulement contre l’État. C’est un coup porté aux peuples. Nous ne nous battons pas pour le siège présidentiel. C’est pour notre dignité ».
Adriana est une femme indigène de la communauté aymará. Elle participe au Féminisme Communautaire Anti-patriarcal de Bolivie. « D’abord nous sommes devenues féministes. Puis communautaires. Ensuite nous nous sommes rendues compte que la communauté aussi pouvait être patriarcale. C’est pourquoi on s’appelle ainsi. »
En entretien téléphonique pour Pie de Página, elle affiche sa posture vis à vis de Evo, des féminismes. Elle raconte aussi le processus d’organisation des peuples et des travailleurs dans son pays, qui a débuté en 2003.

« Ils nous donnent la Bible, ils nous remettent entre les « mains de dieu »
et ils brûlent le whipala. Ils disent qu’ils vont exproprier la pachamama ».



Pas la paix. La justice !
La répression des manifestations a fait une vingtaine de morts en une semaine. Il y en a maintenant pour parler de dialogue avec le gouvernement intérimaire. Mais les organisations sociales refusent cela. « Les organisations ont décidé qu’on ne dialogue pas sur nos morts. Nous ne voulons pas la paix, nous voulons la justice. Nous voulons que soit rétabli l’État de droit et la démission de Jeanine Áñez ».
Adriana Guzmán prévient : ils veulent imposer un nouveau processus de colonisation aux peuples originaires. C’est pour cela qu’ils ont apporté la Bible, qu’ils ont brûlé le whipala. Que dans les rues ils ont surtout agressé les femmes portant des polleras (jupes amples, à jupons), explique-t-elle. C’est ce qui a fait descendre les gens dans la rue.
« Dans les manifestations on criait : « Touchez pas au whipala, merde ! ».
« Touchez pas aux femmes en polleras, merde ! ».

Ils se sont attaqué à des symboles et organisations, résume-t-elle : les premières attaques ont visé les radios communautaires.

C’est pourquoi, on peut débattre de l’erreur de la réélection du président, ils n’ont pas déposé Evo Morales pour des questions électorales. « Ils ne lui pardonnent pas d’être indien », résume-t-elle.
C’est pourquoi les organisations sociales ont fomenté un plan d’action pour se défendre, ce qui inclut le blocage de routes et de villes.
Le tournant : le massacre du gaz
Un moment historique qui ressort et se distingue à divers moments de l’entrevue, c’est le massacre du gaz, en Bolivie en 2003.
Gonzalo Sánchez de Lozada, alors président, mit en œuvre diverses mesures impopulaires. Celles-ci incluaient l’exportation de gaz par l’intermédiaire de ports chiliens, à un moment où la couverture intérieure était très limitée. En octobre, le président autorisa l’intervention de l’armée face aux protestations sociales. Ce qui coûta la vie à au moins 63 personnes lors de ce qu’on appelle le massacre d’octobre ou massacre du gaz.
Carlos Meza, qui fut candidat face à Evo Morales aux précédentes élections, et actuel leader des mobilisations contre sa réélection, était vice-président durant le mandat de Sánchez de Lozada et fut mis en cause dans cette répression. Mais ceci n’est jamais évoqué dans les médias internationaux.
Pour Adriana Guzmán, c’est le tournant pour le mouvement social en Bolivie. Ce processus a amené l’élection de Evo Morales en 2004, le premier président indigène de toute l’histoire du pays. Il a amené la nationalisation du pétrole, et une série de changements structurels. Tout cela, explique-t-elle, fut un processus difficile, plein d’erreurs – comme de bonnes idées. Avec des actions non abouties. Mais qui oui, ont amélioré les conditions de vie des peuples indigènes.

« Ici les peuples sont acteurs. Et il en fut ainsi pendant 13 ans. Mais avec cette démocratie représentative, le pouvoir ne voit que Evo », indique-t-elle.

- Alors ce processus ne disparaît pas avec Evo ?
- Non. Il ne commence ni ne se finit avec le Evo. Il a commencé avant, et il se poursuit aujourd’hui.

Un président indigène dans un pays indigène
Le fait de se reconnaître, de se voir en Evo Morales, en tant que peuple, revient encore et encore au cours de l’entretien. Par exemple : dans son expérience d’éducatrice d’enfants. Elle se souvient qu’avant 2003, quand on demandait aux enfants indigènes ce qu’ils voulaient faire plus tard, ceux-ci répétaient les métiers de leurs parents. Aujourd’hui ils disent qu’ils veulent être présidents, comme le Evo.
« Moi, je ne crois pas en l’État, rit-elle. Mais je ne peux pas nier qu’il y a eu un changement : que les enfants aspirent à quelque chose de différent ». Et ça, d’un point de vue non indien, depuis un corps qui n’a pas souffert de discriminations, ça ne se voit pas.
Adriana souligne certains changements de ces 13 années :
- Université pour les masses ;
- Université indigène, liée aux besoins des communautés ;
- Accès à la santé ;
- Nationalisation des hydrocarbures (impulsée par les peuples) ;
- Création d’un réseau de radios communautaires qui a permis la communication et l’organisation entre différents groupes (c’est l’une des premières choses que cibla le coup de force militaire).
Mais il y a aussi des critiques concernant ce qui n’a pu être transformé :
- Les privilèges des propriétaires terriens et des entrepreneurs n’ont pas disparus,
- Il n’a pas été mis fin à la politique extractiviste,
- Les pratiques machistes persistent effectivement,
- Le travail de formation politique n’a pas été fait dans les universités.

L’organisation communautaire

- Comment avez-vous réalisé cette organisation sociale et communautaire ?
- En Bolivie, tout comme au Mexique, il existe une mémoire communautaire très forte. Une mémoire ancestrale, des pratiques communautaires. Sauf qu’en Bolivie, il n’y a pas ces grandes villes monstrueuses. Ce sont de petites villes. Et il y a une mémoire très forte qui résiste au devenir ville. Même la ville d’El Alto est une ville communauté. Et il y a toute cette mémoire. Nous comptons 500 ans de résistance.
« Le problème c’est que le néolibéralisme
était en train de détruire les organisations et de nous faire mourir de faim. »
Ce fut alors l’élection de Evo Morales. Cela, explique-t-elle, leur a donné de l’air pour s’organiser.
Les hydrocarbures ont été récupérés et il y a eu une redistribution de la richesse. Cela nous a donné du temps pour penser. Nous, femmes, par exemple… sinon je serais dans autre chose, mais pas le féminisme. Je ne suis pas une universitaire. Je n’ai pas terminé l’université, comme beaucoup de mes compañeras. Mais ce processus à exigé de nous que nous pensions au type de pays que nous voulions.
Tout au long de ces 13 années, de nombreuses rencontres ont été organisés en Bolivie. Ceux-ci, « en eux-mêmes sont des espaces pour repenser la justice, à partir de la justice communautaire ». Ces rencontres ont été, à l’occasion, critiquées. « Mais ces rencontres ont favorisé la réflexion ».
Nous avons eu du temps pour nous rassembler, pour penser, pour réclamer la retraite universelle. Que l’État paie aux femmes ce qu’elles ont travaillé. Qu’ils nous donnent accès à la santé, qu’ils nous donnent la retraite. Nous avons pu penser à différentes choses ».

« Le racisme l’a emporté sur le féminisme »
- Evo a été durement critiqué du point de vue du féminisme. Vous, en tant que féministe, comment évaluez-vous cela ?
- Nous sommes devenues féministes pendant le massacre du gaz en 2003. Il s’agit d’un massacre terrible qui s’est déroulé il y a 16 ans. Et depuis, nous avons appris à construire le féminisme. Mais toujours depuis les organisations sociales, paysannes, ouvrières. Bien évidemment, les compañeros sont machistes, et ils cherchent à nous piéger, mais nous ne nous voyons pas faire du féminisme depuis un bureau ou l’université.
De plus, ajoute-t-elle, ce féminisme, qui n’a pointé du doigt que Morales, a paradoxalement un regard « phallocentré », centré sur l’ex-président bolivien.
"Il y a un regard féministe phallocentré sur Evo. Le Evo, comme la plus part des hommes, était, est machiste. Mais ce processus que nous avons mis en œuvre pendant ce temps, nous l’avons tous mis en œuvre. Oui, nous avons réalisé un changement. Bien sûr, non sans problèmes, ni erreurs ni manques. Mais [ce changement] existe, et c’est un processus qui ne concerne pas uniquement Evo. C’est ce qu’elles, elles ne voient pas. Je le résume par le fait que le racisme l’a emporté sur le féminisme."
De ce point de vue, d’un féminisme distant, les critiques « sont réduites, parce qu’elles ne voient pas au-delà d’Evo. Et au-delà il y a un pays qui a été transformé, pas comme nous le souhaitions, mais qui a été transformé. »
Adriana ajoute, disserte. « Oui, il y a une lecture féministe. Oui, il y a une lutte entre machos. J’en conviens. Mais la querelle est plus grande, elle est structurelle. Il s’agit de nous éliminer (les peuples indigènes), pas physiquement mais symboliquement ».

« Notre position en tant que féministes communautaires ne prend pas la défense d’Evo, mais la défense de ce changement. Un changement à travers l’État parfois, et malgré l’État d’autres fois. »


Message à Evo : réfléchis
La féministe en profite pour envoyer un message au Evo. Premièrement : « lui, il ne peut pas en appeler à des négociations de paix, parce qu’il y a des morts. Et « on ne négocie pas sur le dos des morts ». Ça, souligne-t-elle, ce sont la Centrale Paysanne, les organisations sociales qui l’ont décidé. Deuxièmement : Evo ne peut rien apprendre à personne, parce qu’il n’est pas là. « C’est nous qui sommes dans la rue ».
Ceci dit, explique Guzmán, « c’est bien qu’il (Morales) soit parti. Parce qu’il l’aurait au moins emprisonné ou tué, estime-t-elle. Et bien que nous le critiquions, nous nous reconnaissons aussi en lui ». Et ça, remarque-t-elle, souligne-t-elle, « ce n’est pas un détail ».
Second message : « C’est important qu’étant en sécurité, il développe sa propre réflexion. Sa propre autocritique. Pour voir le sens de ce mouvement. Le Evo a envisagé pouvoir revenir… mais non. En ce moment il doit rester là (au Mexique). Ce qui va maintenant se passer dans les rues, appartient au mouvement paysan, aux peuples originaires, aux ouvriers, à la centrale ouvrière (pas tous mais une partie), aux travailleurs des mines, aux femmes créatrices. Au Conseil de Voisinage de la ville de El Alto, qui en 2003, a sorti le président qui commit le massacre. »
Elle ajoute : les mouvements de rue « ne peuvent pas être populistes. Evo, maintenant, n’a pas à revenir. Il doit laisser cela être réglé par la rue. Mais oui, qu’il réfléchisse, qu’il regarde le mouvement zapatiste ».

17/11/2019

À propos des évènements en cours en Bolivie

Moins médiatisés que les révoltes au Chili ou à Hong Kong, les évènements qui secouent en ce moment la Bolivie sont, sans doute plus que les autres, caricaturés:
coup d'état militaires pour les partisans d'Evo Morales, victoire de la démocratie contre la dictature du MAS et de Morales pour la droite et l'extrême droite. Ce changement de pouvoir s'accompagne au mieux du silence complice de la plus part des gouvernements des grands pays et au pire du soutien et de la reconnaissance de l'auto-proclamée présidente par intérim Áñez (qui semble avoir une bible greffée à la main).
Bref, il semble bien compliqué de comprendre ce qui se trame dans ce pays andin.
Je partage donc quelques textes qui semble éviter les caricatures afin de comprendre ce qui se passe dans le pays andin.


 - tout d'abord, cet article plutôt honnête et relativement complet sur la situation (pour un média mainstream): https://www.francetvinfo.fr/monde/ameriques/l-article-a-lire-pour-comprendre-ce-qui-se-passe-en-bolivie_3699383.html


- un texte qui date d'avant la crise bolivienne et qui donne sans doute à comprendre l'une des clefs de la chute de Morales, l'extractivisme: https://www.bastamag.net/Bolivie-Amazonie-Evo-Morales-Indus…

- un texte qui tente de prendre en compte le contexte de l'histoire politique bolivienne mais qui porte une vision politique sans doute trop marquée par l'émergence de cette gauche latino-américaine de gouvernement: https://blogs.mediapart.fr/…/…/bolivie-comment-evo-est-tombe

- enfin, un texte plus politiquement marqué, quoi qu'encore emprunt d'un certain légitimisme, mais qui sans se noyer dans le contexte socio-historico-politique, se focalise sur les évènements présents et les forces en présence: https://agitationautonome.com/…/bolivie-un-soulevement-pop…/

Mais afin de signer mon retour sur ce blog, délaissé depuis bien trop longtemps, je partage avec vous cette traduction du Serpent@Plumes du discours de la chercheuse et féministe bolivienne Silvia Rivera Cusicanqui, tenu lors d'une rencontre de femmes à la Paz, le 12 novembre dernier.
source: https://desinformemonos.org/esta-coyuntura-nos-ha-dejado-una-gran-leccion-contra-el-triunfalismo-silvia-rivera-cusicanqui-desde-bolivia/
Bonne lecture.

 

Participation de Silvia Rivera Cusicanqui1 au Parlement des femmes de la Paz, qui s’est tenu à La Paz, Bolivie, le 12 novembre 2019.




Silvia Rivera Cusicanqui - photo de Desinformémonos


J’ai un très sérieux problème de genoux, il paraît que c’est l’orgueil. Je suis orgueilleuse, effectivement, d’être une femme, et aussi d’une certaine manière d’être restée silencieuse tout ce temps, parce qu’à moi la patrie m’a offert cet accident. Juste le 23 je suis tombée en semant avec ma fille à Cochabamba, et cela m’a donné le ton de la nécessité d’une certaine politique du silence.
J’ai ressenti une excessive saturation discursive. J’admire l’internet des grains de sel, mais j’aime la communication face à face, c’est pour ça que j’ai préféré venir ici et non le faire depuis chez moi, parce que je peux voir les yeux, je peux sentir l’atmosphère, je peux même entendre les broncas contre moi. Tout cela m’aide à être moi-même, à être humble, a être aimable et non prétentieuse. Cette conjoncture nous offre une grande leçon contre le triomphalisme.
Je ne crois en aucune des deux hypothèses qui ont été présentées. Le triomphalisme qui dit qu’avec la chute de Evo nous avons retrouvé la démocratie me paraît excessif, une analyse qui vise à côté. Il manque beaucoup pour retrouver la démocratie, il manque un travail de fourmi, une reconnaissance de l’état actuel de doña Ena Taborga à Rositas2, les compañeras de Tariquía3, les compañeras du TIPNIS4 (Territoire Indigène et Parc National Isiboro-Sécure), doña Marquesa, doña Cecilia, toutes les femmes en lutte, quelque soit leur lutte. Quelques-unes d’entre-elles ont même été candidates, mais il nous manque de prendre en charge ces réalités où la démocratie demeure encore un but très éloigné, parce qu’elles sont encore et toujours dirigées par des syndicats prisonniers de la misogynie, d’intérêts très divers qui se rapprochent avec des intentions menaçantes. Il y a aussi des gens qui se sont interposés, qui ont lutté, et qui cependant, à l’heure de figurer dans les espaces publics, se sont vus privés de parole, comme ce fut le cas à Tariquía.
C’est pourquoi je pense que ceci est un bon forum, positif, afin de commencer à discuter de ce qu’on entend par démocratie et par être indien ou indienne ou originaire. La seconde fausse hypothèse, qui me semble à moi hautement dangereuse, c’est celle du coup d’État, qui ne cherche qu’à légitimer, tout entier, avec le paquet et tout, enveloppé de cellophane, tout le gouvernement de Evo Morales dans ses moments d’abâtardissement les plus forts. Tout cet abâtardissement, le légitimer par l’idée du coup d’État, c’est criminel, et pour autant nous devons réfléchir sur les causes de cet abâtardissement.
En entrant ici il y a une heure, j’ai donné à deux personnes une photocopie du journal du 2 novembre. Je veux que vous voyiez qu’un type appelé Juan Ramón Quintana5, annonçait le 2 novembre la vietnamisation du pays, ce que lui a fait durant des années, c’est à dire endoctriner, c’est à dire pousser les indigènes dans des réseaux des mafias militaires, comme ça a été fait dans de nombreuses communautés. Hugo Moldiz6, qui a travaillé avec ceux qu’on appelle les Ponchos Rouges7… Moi j’ai connu d’autres Ponchos Rouges, moi j’ai connu des frères et des sœurs qui allaient en famille à la colline pour effectuer un rituel avant de partir à la bataille. Ça ce sont les Ponchos Rouges que moi j’ai connu. Ce qu’a fait Hugo Moldiz le 22 janvier 2006 c’est amener une armée en uniforme et parfaitement armée.
Il a fait croire que nous étions face à un gouvernement révolutionnaire dans le style cubain, mais nous engueulait pour les nostalgies gauchistes d’un groupe de machos qui ne sont pas seulement les machos de Camacho8, mais aussi les machos gauchistes, misogynes, qui nous traitent comme chair à canon et comme chair à hameçon afin de créer leurs réseaux de perversion des secteurs populaires.
Je me souviens très bien quand les militaires ont fait une grande orgie avec la COB (Centrale Ouvrière Bolivienne), avec des femmes, afin d’influer sur leurs objectifs. Nous n’avons pas pu nous rendre compte que cela était systématique, que ça a duré des années. Ce personnage et tout son réseau de militaires incluant l’homme qui contrôle les téléphériques. Je suis témoin de l’utilisation politique des téléphériques, de distribution de cartes pour que le prix baisse et massacrer et détruire les pumakataris9.
Tout cela tisse un obscur réseau incluant le directeur de l’ANH (Agence Nationale des Hydrocarbures), un intime de Quintana. Que vient faire l’ANH dans les incendies ? Elle offre des réchauds à gaz. Cette chose honteuse qui est accompagnée d’une défense des incendies est en train d’unir les luttes des femmes, les luttes écologistes, des jeunes, des vieilles comme moi qui sont préoccupées par le futur et par l’eau que consommeront leurs petites-filles et les filles de leurs petites-filles.
Je suis très attristée qu’Evo soit parti, mais l’espoir d’une Bolivie pluriculturelle n’est pas parti, l’espoir que le whipala10 nous représente dans ses différentes variantes n’est pas parti, l’espoir d’en finir avec le racisme n’est pas parti. Nous devons continuer sur le front antiraciste, et nous devons continuer à rassembler des forces afin de pouvoir articuler l’impression de récupérer la démocratie au jour le jour. J’ai beaucoup de peine concernant ce qui s’est passé, je n’ai pas la moindre sensation de triomphe.
Je sais bien que la religion ce n’est pas seulement Camacho, c’est la bronca face l’enivrement généralisée qu’a été le travail syndical de Quintana et ces flics qui viennent avec des canettes d’alcool. Voilà ce qui me fait mal, c’est le même mécanisme qu’utilisaient les colonisateurs au XVIIe siècle, désarmer les communautés en leur donnant des canettes d’alcool. Mais aussi, les propriétaires terriens et les entrepreneurs qui souhaitaient se libérer de la réforme agraire, comme Ponce Sanginés11, qui distribua de l’alcool et il eut toute une hacienda d’indiens folkloriques à exhiber dans des musées.
Nous devons comprendre pourquoi les gens réagissent de cette manière réactionnaire. Ils sont fatigués d’un certain type de politique syndicale, misogyne, qui dirige les gens comme s’ils étaient du bétail. Les femmes de Totora12, qui ont été celles qui ont lutté pour une autonomie indigène, ont été vaincues par leurs propres maris et leurs proches qui leur ont tendu le piège du referendum.
Ce qui s’est passé est bien triste, compañeras, et le triomphalisme d’avoir récupéré la démocratie à partir du moment où Evo est monté dans un avion, me semble d’une banalité et d’une pauvreté impressionnante, mais le défaitisme qui dit qu’il y a ici un coup d’État et que tout est perdu est faux. C’est penser que le MAS est l’unique possibilité que nous avons d’être inter-ethnique, pluriel, pluriculturelle. Parce qu’il y a un ministre gay et quelques femmes qui défendent apparemment le lesbianisme, ont devraient croire qu’il y a une démocratie inter-culturelle et ample et anti-homophobe ? Non, ça ce sont des utilisations symboliques.
Je suis avec le whipala et je sais qu’il y a de nombreux types de whipala, il n’y en a pas qu’un seul. Nous connaissons de vieux whipalas, ils avaient d’autres couleurs bien différentes. C’est cette pluralité que nous devons récupérer, mes sœurs, et aussi la possibilité de nous rapprocher entre femmes et indiennes et indiens. J’ai pleuré en voyant la maltraitance des femmes qui porte la pollera13 au nom de la démocratie, j’ai pleuré en voyant de très jeunes gens maltraités en disant qu’ils sont indiens. L’indien ou l’indienne qui est en nous, nous fait très mal. Ça dépend beaucoup de nous de la libérer et de la rendre heureuse, capable de parler plusieurs langues, d’avoir une fonction de pensée théorique. Voilà ce qu’est pour moi l’être indien.
Je me sens à moitié défaite, mais aussi pleine d’espoir. Nous nous sommes beaucoup dressé pour ce processus et nous avons souffert de son abâtardissement aux mains de ces flics entraînés à l’École des Amériques14. Ils ont beaucoup à perdre, ils ont perdu 30 péniches chinoises, mais ils ont tout le lithium. C’est ça qu’ils veulent piller.
S’il vous plaît, que ce parlement génère un espace où articuler une unité contre ces forces sinistres que commencent à être l’IIRSA (Initiative pour l’Intégration de l’Infrastructure Régionale Sud américaine) et aussi les capitales chinoises, russes, vénézuéliennes et toute cette mafia qui représente l’ennemi principal qui est toujours vivant et en bonne santé et qui arme les gens, les mentalités. Prenons bien soin de nous, mais soyons également conscientes que nous ne pouvons tomber dans la joie qu’enfin l’indien soit parti. Ça, c’est pour moi très douloureux.









1 Sociologue, activiste, théoricienne contemporaine et historienne bolivienne, elle a travaillé sur la théorie anarchiste, ainsi que sur les cosmologies quechua et aymara. Elle fut cofondatrice et directrice en 1983 de l’Atelier d’Histoire Orale Andine (THOA pour l’acronyme espagnol) et dirige actuellement le collectif Ch’ixi. Ce mot évoque une couleur issue de la juxtaposition de couleurs opposées, proche du concept élaboré par René Zavaleta, philosophe et sociologue bolivien, de « société bigarrée », qui exprime la coexistence parallèle de multiples différences culturelles. Elle travaille également directement avec les mouvements indigènes, notamment tupacataristas et cocaleros.
2 Projet hydro-électrique qui menace une zone protégée en Bolivie et rejetée par les communautés.
3 Réserve nationale de la faune et de la flore de Tariquía.
4 Parc national créé en 1965 et déclaré territoire indigène en 1990 à la suite de la lutte de peuples natifs. En 2011 un projet de route traversant le territoire, lancé par le gouvernement de Morales, a été abandonné à la sutie d’une forte opposition et d’une répression féroce.
5 Militaire, sociologue et homme politique bolivien. Il fut ministre lors des trois premiers gouvernement de Morales. Il a été l’une des figure de proue du MAS (Movimiento al Socialismo / Mouvement vers le Socialisme).
6 Avocat, journaliste et universitaire bolivien, brièvement ministre du troisième gouvernement de Morales, en 2015.
7 Groupe indigène radical soutien de la refondation de la Bolivie proposée par Morales dans la nouvelle constitution, spécialement les idées donnant plus de pouvoir à la majorité indigène et expropriant les terres non utilisées.
8 Quasiment inconnu sur la scène internationale il y a encore quelques semaines, cet entrepreneur ultra-réactionnaire, raciste et catholique, est devenu la figure principale de l’opposition au gouvernement de Morales. Ses supporters se font appeler les « machos de Camacho ».
9 Service public de bus urbain mis en place dans un contexte de féroce concurrence du secteur des transports des personnes.
10 Nom donné aux drapeaux rectangulaires, à sept couleurs, utilisées par les groupes ethniques des Andes. Il en existe de nombreuses variantes.
11 Arquéologue qui a notamment étudié le site archéologique de la Cité du Soleil de Tiahuanaco.
12 Petite ville du département de Cochabamba et chef-lieu de la province de Carrasco.
13 Jupe bouffante traditionnelle.
14 Célèbre école militaire US où ont été enseignées aux militaires latino-américains les doctrines de contre_insurrection et inculqué une idéologie anti-communiste.